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19 août 2017 6 19 /08 /août /2017 14:10

L’expression DZ

 

Ce que va faire Ouyahia

Par Saïd BOUCETTA - Samedi 19 Aout 2017

Du pain sur la planche pour l'équipe gouvernementale

Il dispose de quelque 18 mois pour mettre le pays sur les rails. Il le fera avec une équipe qui, jusque-là, a montré le meilleur et le pire.

Le gouvernement ne change pas. Deux ministres trop exposés et visiblement dépassés par l'ampleur du blocage de l'économie ont quitté le gouvernement. Il s'agit de Mahdjoub Bedda, ancien locataire de l'Industrie et Ahmed Saci, ex-ministre du Commerce.

Ces deux responsables qui avaient symbolisé le dangereux virage pris par le pays en trois mois de gouvernance de Tebboune n'auraient de toute façon pas, su expliquer un retournement brutal de leurs «convictions». Leur départ était prévisible. Ajouté à ces «snipers» de l'ex-Premier ministre, le gouvernement Ouyahia s'est séparé de l'ancien ministre de l'Habitat un proche parmi les proches de Abdelmadjid Tebboune. Il est venu dans ses valises. En politique, ce genre de proximité ne pardonne pas.

Hormis ces trois départs remplacés par deux ministres aguerris et un jeune loup, Abdelwahid Temmar qui dispose d'une expertise dans le bâtiment, susceptible de lui être bénéfique dans le département de l'habitat, le gouvernement Ouyahia est la copie conforme à celui conduit par Abdelmadjid Tebboune. C'est dire que le problème n'est pas lié aux hommes et aux femmes qui composent le gouvernement, mais à quelques instructions «malheureuses» qui ont jeté le trouble dans les milieux d'affaires, et pouvaient le cas échéant provoquer la paralysie du pays. De fait, le nouvel Exécutif est missionné pour rectifier le tir et poursuivre le déroulement du programme présidentiel, tel qu'il a été soumis aux deux chambres du Parlement.

Sur le terrain, ce ne sera pas si simple que cela. Le nouveau locataire du Palais du gouvernement devra procéder prioritairement à la réparation des dommages portés à l'industrie nationale et au commerce extérieur. Rétablir la situation au niveau des ports, libérer les marchandises qui devraient l'être, alimenter le marché pour éviter une quelconque pénurie qui s'accompagne systématiquement de l'inflation, sont autant d'actions à mener au plus vite. Il y a certainement aussi la nécessaire remise en l'état de l'édifice de l'Industrie, «dévasté» par un terrible séisme nommé Bedda. Confié à des ministres d'expérience, le redressement de la situation dans les deux départements ministériels les plus atteints par la crise devrait déboucher rapidement.

Il reste que Ahmed Ouyahia a d'autres chantiers à engager et surtout à mener à bien. De lourds dossiers, à l'image de la rentrée solaire et universitaire, la loi de finance 2018 et même la gestion de l'Aïd El Adha, constituent autant de priorités qui occuperont les ministères concernés et par voie de conséquence, le Premier ministre. Un scandale est vite éclaté.

L'opinion a eu à le constater par le passé. Ce sont des situations qu'il va falloir gérer avec le sérieux qu'exige la situation actuelle.

 

Allergique à l'endettement extérieur

Tous ces dossiers, déjà ouverts, faut-il le souligner, seront débattus à l'occasion d'un Conseil de gouvernement qui se tient traditionnellement le mercredi. Le Premier ministre dispose de six jours pour potasser les questions de l'heure. Il devra faire un rapide inventaire de l'état du pays dans l'ensemble des domaines et notamment ceux qui concernent la rentrée sociale. Son prochain contact avec son équipe ne pourra être que celui de l'action. Le temps presse.

Dans ce laps de temps, Ouyahia aura également à préparer son laïus et fixer aux membres de l'Exécutif, leurs priorités et le sens de leur mission sous sa gouvernance. Il est entendu que la loi de finances 2018 aura la part du lion dans les propos du Premier ministre. Et pour cause, chaque département formulera très bientôt ses besoins au ministre des finances. Et connaissant «l'allergie» qu'éprouve Ouyahia à l'endettement extérieur, pour l'avoir vécu de l'intérieur, la consigne sera certainement de faire un maximum d'économie, pour proposer une loi de finance qui se rapproche le plus possible de l'équilibre budgétaire.

Même si l'on conçoit aisément que le Premier ministre ne dérogera pas à la tradition de poursuivre sur la lancée des gouvernements précédents en matière de resserrement des budgets de fonctionnement et d'équipement, sa grande résolution à éviter coûte que coûte le recours au FMI aura une résonance particulière. Signataire d'accords quasi «suicidaires» avec le gendarme financier de la planète, le gros souci de Ahmed Ouyahia consistera à éviter une réédition de l'épisode du programme d'ajustement structurel. Il prend les rênes du gouvernement à un moment où le pays se rapproche de pareille issue malheureuse. Son rôle sera de faire en sorte à ce que le pays échappe à un futur probable qui ressemblerait à un passé douloureux. Il a d'ailleurs fixé des échéances à 2025. «Si d'ici là, rien n'est fait, le pays retombera dans une situation d'endettement inextricable», a-t-il affirmé en substance. En étant à la tête du gouvernement, il dispose de la confiance du président de la République pour apporter le déclic qu'il faut pour créer un autre avenir probable, autrement plus serein.

Cela passe par la contraction des importations, mais pas que, puisqu'il est entendu que la grande «révolution industrielle» est encore à faire. Poursuivra-t-il l'oeuvre de Abdessalem Bouchareb qui avait imaginé tout un processus de réindustrialisation en s'appuyant sur des champions publics, associés au privé national? Réactivera-t-il les projets de partenariat public-privé dans l'agriculture gelés par Abdelmadjid Tebboune? Donnera-t-il la primauté aux exportateurs? Bref, Ouyahia se doit d'expliciter la démarche de son gouvernement, censé apporter le souffle nouveau, dont l'économie nationale a fortement besoin.

 

En phase avec les Algériens

Il dispose de quelque 18 mois pour mettre le pays sur les rails. Il le fera avec une équipe qui, jusque-là, a montré le meilleur et le pire. Dans la confection de son gouvernement, Ahmed Ouyahia dit à l'opinion que l'important c'est l'action pas forcément l'homme ou la femme qui est derrière. Il suffirait donc de se donner des objectifs atteignables et agir selon des normes établies à l'avance. Ce qui manquerait à cette équipe, ce pourrait être un meneur qui sait parler aux Algériens. Sur ce chapitre, Ahmed Ouyahia est passé maître. C'est d'ailleurs pour cela qu'il est l'homme politique le plus attaqué par l'opposition.

Qu'il dise ses quatre vérités au peuple ne peut que renforcer sa position. L'homme est véritablement en phase avec les Algériens. Cette proximité lui permettra de trouver les mots pour leur expliquer les temps difficiles qui concernent la quasi-totalité des économies de la planète. Il faut savoir que même le géant chinois voit sa croissance économique faiblir. D'autres grandes nations censées tirer profit de la baisse des prix des hydrocarbures, à l'image de la France, de l'Espagne ou de la Grande-Bretagne, n'ont pas amélioré pour autant les indices de pauvreté dans leurs sociétés. C'est dire que les temps sont réellement durs. Les Algériens qui jusqu'à cette année ont échappé aux conséquences de la crise pétrolière grâce au Fonds de régulation des recettes et aux réserves de changes, voient arriver les premières difficultés.

Les premières mesures, peut-être impopulaires, mais destinées à sauvegarder la souveraineté du pays, marqueront la mission de Ahmed Ouyahia. Il sera vilipendé par les partis de l'opposition, le chômage risque de progresser encore aux premiers mois de l'année prochaine, le niveau de vie de la population s'en ressentira. Mais les Algériens jugeront l'action du gouvernement à l'aune de l'espoir de sortie de crise qu'il suscitera auprès de l'opinion nationale.

Le Premier ministre endossera tout cela. En acceptant le poste, il savait sans doute que tout cela allait advenir. Mais il est clair que Ouyahia a un plan. Il n'est pas adepte de l'improvisation, c'est un homme d'Etat qui dispose d'un capital expérience impressionnant. Le tout est de savoir s'il saura capitaliser son expérience, son expertise et celle de toute l'équipe gouvernementale.

 

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