Revue de presse :
Jeune Afrique
Farid Alilat
Publié le 21 mars 2024
Initialement prévue en décembre prochain, l’élection présidentielle algérienne aura lieu le 7 septembre 2024, annonce la présidence dans un communiqué rendu public ce jeudi 21 mars. Le communiqué indique également que le corps électoral sera convoqué le 8 juin prochain.
La décision d’organiser une élection présidentielle anticipée a été prise à l’issue d’une réunion tenue par le président Abdelmadjid Tebboune en présence du Premier ministre, du chef d’état-major de l’armée, du directeur de cabinet de la présidence et du ministre de l’Intérieur.
Abdelmadjid Tebboune candidat à sa propre succession ?
Le communiqué de la présidence n’a pas évoqué les motifs qui justifient la tenue de cette élection en septembre alors que le mandat d’Abdelmadjid Tebboune expire en décembre 2024. Élu en décembre 2019, le chef de l’État ne s’est à ce jour jamais exprimé publiquement sur son intention de briguer ou non un second mandat. À moins d’une grosse surprise, Abdelmadjid Tebboune, aujourd’hui âgé de 78 ans, devrait toutefois se porter candidat à sa propre succession."
Suite : le 22 mars 2024
"Le pays ne traverse ni crise politique, ni crise institutionnelle, ni dissensions majeures au somment de l’État qui justifieraient aujourd’hui cette décision, comme ce fut le cas en septembre 1998. Le président Liamine Zeroual avait alors décidé de démissionner et d’organiser une élection présidentielle en avril 1999 alors que son mandat devait expirer en novembre 2000, dans un contexte qui n’a rien à voir avec celui de 2024. Zeroual était lassé du pouvoir, en désaccord avec une partie de l’establishment militaire. Tel n’est pas le cas avec l’actuel chef de l’État [..]
Mais alors comment comprendre l’annonce de ce jeudi 21 mars, alors qu’officiels, médias et relais du pouvoir répètent à l’envi que « l’Algérie nouvelle » promise par Abdelmadjid Tebboune depuis son accession au pouvoir en décembre 2019 est sur la bonne voie ? Les réserves de change culminent à près de 80 milliards de dollars grâce à l’envolée des cours du pétrole. Sur le plan économique, les indicateurs sont encourageants. Mardi 20 mars, le Palais d’El Mouradia annonçait que 6 103 projets d’investissements ont été réalisés entre novembre 2022 et février 2024, générant 150 000 emplois directs […]
Certes, l’armée affiche homogénéité et cohésion. Certes, encore, Saïd Chengriha est un chef d’état-major qui ne souffre pas de contestation et ne manque jamais une occasion de s’afficher aux côtés du président. Mais la Grande Muette est aussi traversée par des courants qui n’épousent pas forcément le discours officiel qui voudrait que tout va bien en Algérie, et qui s’interrogent sur la perspective de voir Abdelmadjid Tebboune terminer son second mandat à l’âge de 85 ans. Dans cette hypothèse, on comprendrait alors que Tebboune ait décidé de couper l’herbe sous les pieds de ceux qui pourraient envisager un futur pour l’Algérie sans lui. En décidant d’avancer le scrutin, il signifierait ainsi à tout monde qu’il est le véritable patron, le maître des horloges, le grand ordonnateur de cette présidentielle, l’homme de la situation.[…]
La décision d’organiser ce scrutin le 7 septembre est aussi une habille parade pour éviter que la campagne électorale n’intervienne en pleine rentrée scolaire et sociale, période traditionnellement riche en marasme, grognes, grèves et autres tensions. Même si les mouvements de contestation et de protestation sont sous contrôle total depuis l’étouffement du Hirak à coups de répression et d’emprisonnements, le pays n’est jamais à l’abri d’une irruption. Il fait se souvenir que personne, absolument personne, n’a vu venir le Hirak de février 2019 qui a fait tomber le régime de Bouteflika en moins de six semaines. »
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Anadolu Ajansi (turquie)
Aksil Ouali
21.03.2024 - Mıse À Jour : 21.03.2024
« Cette décision, surprenante, a été prise, selon la même source, à l’issue d’une réunion consacrée aux préparatifs des prochaines élections.
Une réunion à laquelle « ont pris part les présidentes des deux chambres du Parlement, le président de la Cour constitutionnelle, le Premier ministre, le Chef d’état-major de l’armée, le directeur de cabinet de la présidence, le ministre de l’Intérieur et le président de l’Instance nationale indépendante pour les élections »[…]
A six mois de ce rendez-vous, seulement une personnalité a annoncé sa candidature officielle à la prochaine présidentielle.
Il s’agit de la présidente de l’Union pour le Changement et le Progrès (UCP, un parti d’opposition), Zoubida Assoul.
Plusieurs chefs de partis se sont exprimés, ces dernières semaines, sur le prochain rendez-vous électoral, appelant les autorités à mettre en place « les conditions politiques idéales pour un scrutin libre et indépendant ».
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Le Soir d’Algérie
LSA
Publié le 22-03-2024,
« Le Président de la République, dans son souci de transparence, a déstabilisé ses adversaires, mais également un peu ses alliés par cette annonce qui semble brutale, dans la forme, mais tellement cohérente dans le fond.[…]
Les événements de 2019, la présidentielle reportée de juillet 2019, celle « à la Hussarde » de décembre 2019, avaient modifié le calendrier électoral algérien. Bouleversé les traditions à cause d’événements politiques exceptionnels de par leur gravité.
L’annonce du Président Tebboune est donc le signal, officiel, d’une sortie de crise. L’Etat algérien n’est plus en crise ou en situation d’urgence. Il a reconquis sa stabilité. Ses institutions ont retrouvé leur équilibre. Il a retrouvé son processus décisionnaire. L’agenda électoral est donc re-calibré en fonction de cette norme. De la norme démocratique. De ce retour à la quiétude constitutionnelle et institutionnelle. […]
Le troisième enseignement est, sans nul doute, le calcul géopolitique. Le dernier sommet du gaz, la gestion des conflits et les mutations géostratégiques et sécuritaires dans la région ont certainement muri cette réflexion. Influée sur cette annonce. L’Algérie joue une partition serrée qui va conditionner son avenir de Nation face aux nouveaux colonialismes.
Les menaces extérieures sont telles, réelles et palpables, qu’écourter le premier mandat est une nécessité tactique. Une anticipation de turbulences programmées. L’enjeu international prédomine sur l’enjeu national.
L’Algérie se doit de montrer son unité intérieure, sa cohérence domestique, avec un Président, une Armée et des institutions en ordre de bataille pour prévenir les crises extérieures. Et elles sont déjà à nos portes. Et elles visent notre souveraineté et notre sécurité.[…]
APS
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La Croix
(avec AFP), le 21/03/2024
« Le corps électoral sera convoqué le 8 juin 2024 […]
La dernière élection présidentielle, remportée par Abdelmadjid4 Tebboune avec 58 % des voix et marquée par une forte abstention, avait eu lieu le 12 décembre 2019. Il avait succédé à Abdelaziz Bouteflika, poussé à la démission en 2019 sous la pression de l’armée et du Hirak, un mouvement de contestation populaire. […]
La présidence algérienne a même annoncé le 11 mars que Abdelmadjid Tebboune effectuerait « fin septembre-début octobre »une visite d’État en France […]
La visite, programmée d’abord début mai 2023, avait été repoussée à juin de la même année, les Algériens craignant alors qu’elle ne soit gâchée par les manifestations du 1er mai contre la très contestée réforme des retraites en France, selon des sources concordantes.
Mais Abdelmadjid Tebboune n’a ensuite jamais confirmé sa venue, qui devait consacrer l’embellie entre les deux pays après nombre de crises diplomatiques. Il s’était en revanche rendu au même moment en visite d’État en Russie, ce qui avait été perçu comme un désaveu envers Paris.
En décembre, Alger assurait encore que les conditions d’une visite n’étaient « pas idoines », évoquant alors cinq dossiers à régler au préalable, dont ceux de la mémoire, la mobilité, la coopération économique et des essais nucléaires français dans le Sahara algérien. La question de la colonisation française (1830-1962) pèse encore très lourd entre les deux pays."
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EUROPE 1
avec AFP, le 11 mars 2024
« Le président algérien Abdelmadjid Tebboune effectuera une visite d'État en France "fin septembre-début octobre", a annoncé lundi l'Élysée à l'issue d'un entretien téléphonique entre Abdelmadjid Tebboune et son homologue français Emmanuel Macron. Cette visite, plusieurs fois reportée sur fond de chauds et froids récurrents entre les deux pays, aura lieu "à une date à préciser" durant cette période, indique la présidence française. Programmée d'abord début mai 2023, elle avait été repoussée à juin de la même année, les Algériens craignant alors qu'elle ne soit gâchée par les manifestations du 1er mai contre la très contestée réforme des retraites en France, selon des sources concordantes.
Une visite en Russie, perçu comme un désaveu envers Paris
Mais Abdelmadjid Tebboune n'a ensuite jamais confirmé sa venue, qui devait consacrer l'embellie entre les deux pays après nombre de crises diplomatiques. Il s'était en revanche rendu au même moment en visite d'État en Russie, ce qui avait été perçu comme un désaveu envers Paris. En décembre, Alger assurait encore que les conditions d'une visite n'étaient "pas idoines", évoquant alors cinq dossiers à régler au préalable, dont ceux de la mémoire, la mobilité, la coopération économique et des essais nucléaires français dans le Sahara algérien.[…]
"S'agissant des questions mémorielles, ils se sont félicités des récentes avancées de la Commission mixte franco-algérienne d'historiens présidée par les professeurs Mohamed Lahcen Zeghidi et Benjamin Stora, qui se réunira de nouveau en avril, ajoute-t-elle. "Ils ont également évoqué les questions régionales et la coopération au Conseil de sécurité des Nations unies, s'agissant notamment du conflit au Proche-Orient", poursuit-elle.
Le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin s'était rendu en novembre à Alger, où il avait été reçu par le président algérien, pour évoquer notamment "la lutte contre la criminalité organisée", les "migrations" ainsi que les "conséquences de la crise" au Proche-Orient. »
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Le Monde
Le 22 mars 2024
[…] L’unique candidature rivale annoncée jusqu’à présent est celle de Zoubida Assoul, avocate et dirigeante de l’Union pour le changement et le progrès (UCP), pour qui la politique de la chaise vide sert le pouvoir. Il lui faudra cependant réussir à collecter les signatures de 600 élus ou 75 000 citoyens. La décision d’anticiper l’élection va rendre cette tâche encore plus ardue pour tous les aspirants.
Une des analyses les plus en vogue sur les réseaux sociaux est que le but de la manœuvre est justement de prendre de court les potentiels candidats en ne leur laissant pas le temps de former leurs équipes de campagne – laquelle devra par ailleurs se dérouler durant le mois d’août, période de grande chaleur qui risque d’être dissuasive.
Enfin, une dernière lecture suggérée avec prudence lie cette mesure à la perspective d’une visite en France de M. Tebboune, annoncée pour « fin septembre, début octobre ». Organiser une élection en décembre aurait eu pour conséquence d’avoir un président algérien en fin de mandat en visite officielle à Paris, avec le risque d’être accusé d’être allé chercher un « adoubement » en France. En avançant l’élection au 7 septembre, ce sera un président réélu que rencontrerait Emmanuel Macron. Si tant est que la rencontre ait lieu, disent certains, en référence aux rendez-vous déjà manqués entre les présidents algérien et français.
Karim Amrouche(Alger, correspondance)