10^e FÊTE DE L’ALTO

Samedi 20 août

Pour cette première soirée –après celle du 19 juillet - un public nombreux et curieux de découvrir le guqin, se pressait samedi 20 août dans la salle municipale de la Filature du Pont de fer. Après les mots de bienvenue de  Madame Françoise Schmid  au nom de la Présidente de Viv’alto, Marie-Hélène Bénéfice, un programme original nous attendait composé de musique traditionnelle chinoise, de projections et de textes poétiques sur le thème de la montagne et de l’eau.

Voici comment John Bell Young, dans les Cahiers d’ethnomusicologie (OPENEDITION, traduction de Isabelle Schulte-Tenckhoff), décrit le guqin pratiqué en Chine depuis 3 000 ans et longtemps réservé aux seuls lettrés ; :

« Le guqin est une caisse oblongue plate d’une longueur d’un mètre environ, dont la largeur est de dix-sept centimètres à une extrémité et de dix centimètres à l’autre. Son épaisseur est de trois à cinq centimètres. Sur sa largeur, la surface supérieure est légèrement convexe, le fond étant plat et muni de deux ouïes. En fait, tout le corps allongé représente une caisse de résonance dont la surface supérieure sert de touche. L’instrument est muni de sept cordes traditionnellement faites de fils de soie tordus, qui sont pincées avec les doigts de la main droite, tandis que ceux de la main gauche se déplacent le long de la table pour appuyer sur les cordes, les effleurer pour produire des harmoniques, voire même les pincer occasionnellement. Treize marques circulaires incrustées servant à indiquer les positions de doigté de la main gauche sont alignées d’un côté de la table. Au cours de sa longue histoire, l’instrument était utilisé dans un ensemble de musique rituelle, et aussi pour accompagner des chants. Mais son rôle principal a toujours été celui d’un instrument joué en solo. »

Trois chants traditionnels étaient au programme: Impressions de montagne et d’eau ; Dialogue du pêcheur et du bûcheron ; De la séparation, du voyage. Le guqin et l’alto alternant les solos et les duos. Des poèmes bilingues seront dits par les deux artistes. La voix douce et flûtée du guqin et l’accent musical de Ruixin Niu.

Le pêcheur et le bûcheron qui vénère la musique de l’eau, personnifient la montagne et l’eau.

Des gouttes de pluie s’écrasent sur les rochers, tandis que les premières lueurs de l’aube caressent les crêtes d’une lumière parcimonieuse. Les doigts du jeune maître Simon Debierre plaquent quelques accords sur les cordes du guqin. Ruixin Niu à l’alto égrène des  notes d’une grande fraîcheur. Sur l’écran, se déploient les images à l’encre d’un dessin animé couleur de roches. Bientôt la pluie s’intensifie dont le rideau masque les pentes abruptes. Bienfait pour les arbres de la vallée, mais brouillant la  vue dantesque des sommets. Un mariage, une osmose, un combat. La plainte prolongée du guqin que souligne le chant de l’alto exprime cet antagonisme. La pluie bienfaisante. Les orages dévastateurs. La montagne immuable, imposante mais soumise aux caprices du ciel. L’eau qui ruisselle et ronge les pentes.  L’eau qui jaillit en cascades. L’alto s’emballe, crie, se déchire, tandis que le guqin poursuit son chant d’une grande douceur comme un filet d’eau qui s’écoule. Le mystérieux Mont Hua. L’eau source de vie.

Quand l’automne recouvre la montagne de son manteau de froidure, c’est l’heure de la séparation. Les oies sauvages s’envolent vers des lieux plus cléments. Le chant du guqin d’une infinie tristesse se prolonge et s’étire comme un filament dans le ciel.

Cette double découverte d’une musique et d’un instrument largement méconnus en Occident pouvait déconcerter. Mais c’est l’intérêt de telles initiatives qui permettent de s’évader des sentiers battus pour aller à la découverte de « l’autre ».

Une belle soirée en ces temps incertains.

Bernard DESCHAMPS

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