Un émouvant hommage a été rendu aujourd'hui au crématorium de Nîmes à René Bard (René est à gauche sur la photo, Michel Berthier au milieu) par sa famille, par Christian Jourdan qui a évoqué le Communiste et le militant de la CGT, et par Michel Berthier qui a prononcé ce témoignage :
"J’ai fait la connaissance de René Bard au sein de l’Association d’amitiés franco-algériennes créée par Bernard Deschamps, France/El Djazaïr, dont j’ai été longtemps le secrétaire.
En pensant à René, me reviennent spontanément à l’esprit les voyages en Algérie. René et moi avons participé au voyage de 2007. Bernard Deschamps, évoque ainsi la rencontre que nous fîmes, à Alger avec le colonel Hassan (Youcef Khatib) qui avait été le dernier chef militaire de la Wilaya IV à la veille de l’indépendance. René était hanté par le souvenir de la guerre d’Algérie à laquelle il avait participé en tant qu’appelé du contingent accomplissant son service militaire. Le face à face fut émouvant entre l’ancien soldat français et le colonel Hassan « C’est la première fois que je rencontre un fellagha » (un rebelle), lui dit René très ému. Le colonel Hassan ne s’offusqua pas du terme employé. L’échange entre eux nous bouleversa.
L’année suivante, René repartit sur les terres où il avait été cantonné en compagnie d’un ami, membre de l’association, qui lui-même y avait été prof -coopérant après l’indépendance . Notre ami aurait aimé être là pour raconter aussi ce retour où l’accueil, par la population locale fut si fut chaleureux . Ils en revinrent tous deux avec des souvenirs qu’ils ont souvent racontés.
2012, nouveau voyage dont j’étais responsable.
Lors de ce voyage et de notre séjour à Alger, le chauffeur attitré de l’Hôtel Suisse où nous logions, a proposé de me conduire au monastère de Tibhirine. Le nombre de places étant limité à 4( dont le chauffeur), j’ai fait une offre aux participants au voyage. René a immédiatement souhaité venir et nous sommes donc partis, René, Laurette Bastaroli et moi.
Ce fut certainement pour nous trois, le moment le plus impressionnant et le plus émouvant de ce voyage ; en particulier, lorsque devant les tombes où ont été déposées les têtes des moines assassinés, nous avons écouté la lecture du testament du prieur du monastère, Christian de Chergé, texte dense et saisissant. Deux ans avant le drame, il pressent en effet que la fin des moines de Notre Dame de l’Atlas pourrait être tragique et clame son respect et son amour pour les habitants de ce pays. Des trois j’étais celui qui « croyais au ciel », René et Laurette, ceux « qui n’y croyaient pas » (comme dans un poème d’Aragon) . Et pourtant, nous étions là, figés, bouleversés, les larmes aux yeux. A notre retour à Alger, René m’a confié avoir vécu là, un des moments les plus intenses de sa vie.
Je ne l’ai pas oublié."
Michel Berthier