(Dernière mise à jour, le 6 mars 2020)

Le Restaurant-Bar à vin La Marmite de Nîmes, au décor délicieusement rétro, accueillait dimanche soir, pour un moment musical,  les nombreux invités – il a fallu pousser les murs – de la liste Nîmes Citoyenne à gauche conduite par Vincent Bouget et Jo Menut.

    Pour animer cette soirée : Antoine Mézy et  Aimée Hege à la clarinette,  Eléanore Hege au basson, qui constituent le Trio Bocal ; Tom Gareil au vibraphone ; Denis Lanoy pour un poème de Louis Aragon et le compositeur et chef d’orchestre Jean-Pierre Neel.

    Mozart était à l’honneur. Contemporain de la Révolution française – il avait 33 ans en 1789 – le compositeur autrichien est généralement crédité de sympathies révolutionnaires. Des ondes positives à l’évidence passaient entre le public et les musiciens du Trio Bocal qui interprétèrent un des cinq Divertlmenti K439b suivi du Concerto pour clarinette.

     La joie éclate dès les premières notes du Divertimento. Les clarinettes entament un dialogue  léger, primesautier avec la voix grave au timbre boisé du basson. Un clin d’œil espiègle comme une invite. Une cabriole désinvolte…Le ton se fait ensuite plus romantique, de douceur retenue, encore incertain de la réponse de l’aimée. Enfin le bonheur qui se manifeste par une ronde échevelée, sautillante avec des accents  de danse campagnarde

     L’Adagio du Concerto pour clarinette nous sera offert par Antoine Mézy accompagné au piano par Jean-Pierre Neel. Je serai très ému par son interprétation délicatement affectueuse.

     George Gershwin était également au programme. On passe alors à un tout autre registre. Jazzy bien sûr  et endiablé, dans lequel le Trio et le pianiste sont parfaitement à l’aise. Avec Astor Piazzola c’est encore autre chose. Ses diverses variantes du tango argentin. Glissé, endiablé, impertinent, sautillant mais toujours sensuel en diable. C’est Piazzola qui sera bissé après de chaleureux applaudissements.

     Parfaitement inattendu, le choix de la lecture par Denis Lanoy de Réponse aux flaireurs de bidet * de Louis Aragon, accompagnée à la clarinette par Antoine Mézy, témoigne du caractère impertinent et iconoclaste de cette liste pour les élections municipales. Cette Réponse fait partie du recueil La Grande gaïté dont les textes, écrits en 1927 et 1928, sont contrairement au titre, d’un profond pessimisme. Située en fin de période, la Réponse se conclut sur une note plus gaie : « Je chante l’amour qui sait ce que c’est d’aimer » qui succède à une longue confession ( ?) grinçante et désabusée.

A propos de l’enfant :

Cette chiure ambulante qu’on fagote afin

De l’exiber aux relations le dimanche 

Ou encore ceci :

Regarde maintenant  jeune homme

Le couple qui se désagrège

……

Une suave odeur séminale a couvert les deux corps

D’un drap plus lourd que les fleurs du magnolia

    Les improvisations d’Antoine Mézy à la clarinette accompagnent le texte en l’illustrant parfois, en décalage souvent, soulignant ainsi l'amertume et l'accentuant  en la saupoudrant de notes gaies. Du bel ouvrage !

     Enfin, à ma grande honte, je dois avouer que je ne connaissais pas Tom Gareil. Je l’ai donc découvert au vibraphone dans une de ses compositions, psychédélique, interstellaire, descendue pour nous du cosmos. J’avais la tête dans les étoiles, comme en ces nuits d’été sur les hauts de Soudorgues quand pleuvent les météorites.

     Le public debout salua longuement la prestation des artistes.

     Après ces moments de communion musicale, un échange s’engagea sur ce que doit être une politique municipale de la culture. Tom Gareil, Denis Lanoy, Antoine Mézy et Jean-Pierre Neel sont en effet candidats sur la liste Nîmes Citoyenne à Gauche. Le talent, la fraîcheur, la spontanéité de la jeunesse et l’expérience des aînés… La politique autrement !

Bernard DESCHAMPS

1^er mars 2020

* Aragon, L’œuvre poétique, IV, 1927-1929, Idées et Editions, Paris, 1974.

(Photo: Antoine Mézy par Frédéric Deschamps)