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12 octobre 2018 5 12 /10 /octobre /2018 06:32

C’est une longue histoire. Une histoire d’amitié. Je connais Jean-Pierre depuis plus de cinquante ans. Il me disait récemment avoir retrouvé une photo où nous sommes ensemble aux Saintes-Maries-de-la-Mer. Il devait avoir alors 14 ou 15 ans. Ce dernier ouvrage ( Seuil, mai 2018 ) qui fait le bilan de ses combats me parle d’autant plus que j’ai  suivi avec intérêt sa carrière de juge pendant vingt-deux ans président du tribunal pour enfants de Bobigny.

C’est son frère Serge qu’Annie et moi avions d’abord connu en colonie de vacances à Bois Salève près de Genève. Ce sont de ces amitiés de jeunesse qui vous marquent pour toute une vie. Nous étions restés liés à Serge devenu un brillant chirurgien ainsi qu’à toute l’équipe de monos et d’infirmières de cette colonie de la SNCF. Y compris après la disparition prématurée de Serge qui nous avait tous profondément affectés. Lorsque j’allais à Paris, j’étais hébergé chez ses parents, rue Chaudron. J’ai peu connu son père souvent absent pour son travail, mais j’ai bien connu sa maman mécanographe à la SNCF et qui, comme l’écrit Jean-Pierre (P.11), était de gauche. Je peux attester qu’elle était de sensibilité communiste.

Je rappelle cela non pas par je ne sais quelle nostalgie sénile mais parce qu’il évoque lui-même sa jeunesse et parce que je pense que les diverses influences reçues alors, hongroise, polonaise, juive, ouvrière, communiste, ont forgé sa personnalité et expliquent les courageux combats professionnels, syndicaux et politiques qu’il a livrés et qu’il continue de livrer.

Adhérent d’aucun parti, ancien membre du cabinet de la Ministre socialiste Georgina Dufoix,  défendant des positions dans lesquelles les Communistes se reconnaissent souvent, il fait partie, disons, du Peuple de Gauche. En ces temps d’incertitude, il n’est peut-être pas inutile de rappeler que la gauche est profondément inscrite dans le paysage politique français.

Donc, dans ce livre, le Juge Rosenczveig nous conte ses combats pour que soient reconnus les droits de l’enfant car, nous dit-il : « La France est aujourd’hui dans une phase de stagnation. La  dynamique « droits de l’enfant » des années 1980 s’est largement essoufflée. Les discours sur les droits de l’enfant ont reculé à la faveur de ceux mettant en avant la figure alarmante du jeune délinquant. » (P. 261)

C’est au lendemain de la Deuxième guerre mondiale, portée par le souffle puissant de l’aspiration populaire à la liberté  et à l’épanouissement personnel, que le 2 février 1945 fut promulguée l’Ordonnance n° 45-174 relative à l'enfance délinquante, cible aujourd’hui de toutes les attaques de la droite, de l’extrême-droite et aussi malheureusement parfois d’une partie de la gauche.

L’auteur cite Philippe Ariès, Célestin Freinet et Françoise Dolto qui ont donné à l’enfant « une histoire […] une sensibilité, un psychisme. » L’enfant  alors, n’est plus perçu « comme une chose appartenant à ses parents. Il n’est plus seulement un être à protéger. Comme toute personne, l’enfant est doté de droits économiques, civiques, civils, sociaux et culturels. »(P.259).

Emblématique de la pédagogie Freinet, le « texte libre » qui permettait à l’enfant d’exprimer ce qu’il ressentait et pensait et qui servait de support à l’apprentissage de la lecture et de l’ensemble des connaissances s’y rapportant, s’inspirait de cette philosophie. «  Un texte libre doit être vraiment libre. C’est-à-dire qu’on l’écrit lorsqu’on a quelque chose à dire, lorsqu’on éprouve le besoin d’exprimer par la plume ou le dessin, ce qui bouillonne en nous. » (C. Freinet, cité par le Dictionnaire de la pédagogie Freinet, éditeur ESF, sciences humaines pour ICEM, Paris,  août 2018). C’était non seulement le moyen de bâtir un enseignement à partir des préoccupations de l’enfant, c’était aussi pour l’enfant un moyen pour se construire et s’affirmer en tant qu’être humain. Ce n’était pas toujours immédiatement compris par les parents. Ayant pratiqué cette pédagogie à ma sortie de l’Ecole Normale, j’ai conservé le souvenir d’une époque au cours de laquelle j’avais le sentiment – à l’opposé du formatage -  de faire vraiment œuvre humaine.

Je ne me risquerai pas à résumer « Rendre justice aux enfants » ( Editions du Seuil, Paris, mai 2018) de crainte d’en affadir le contenu. Je laisse le soin aux lectrices/teurs d’en découvrir la richesse.

Bernard DESCHAMPS

12 octobre 2018

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