(Dernière mise à jour, le 23 juillet 2024 à 22h.)
Je suis passé, dimanche soir, comme beaucoup, du soulagement et de la joie de constater les progrès du Nouveau front populaire arrivé en tête et l’échec du RN qui n’a pas atteint la majorité absolue qu’il ambitionnait, à l’effroi en apprenant son succès dans les six circonscriptions du Gard.
Que s’est-il passé pour que ce département, dont tous les députés étaient communistes en 1978, ne soit désormais représenté que par des députés d’extrême-droite, alors que la gauche est majoritaire à Nîmes ? Cela tient pour une part au caractère anti démocratique du scrutin majoritaire et au découpage des circonscriptions. Mais pas que.
Comment ce département aux riches traditions ouvrières et démocratiques, le département des Camisards et des Maquisards, qui fut en pointe contre les guerres coloniales, a-t-il pu céder au racisme, à l’antisémitisme et à l’islamophobie ?
Par-delà les erreurs que nous avons pu commettre, il va nous falloir réfléchir à ce qui a changé en 46 ans. Aux effets de la désindustrialisation et de la concentration agraire ; à la détérioration des conditions de vie et à la misère pour un nombre croissant de nos concitoyens ; au recul de la mémoire et à l’oubli des leçons de l’histoire ; aux espoirs déçus, ces dernières années, de celles et ceux qui avaient fait confiance à la gauche; à la sophistication des médias aux mains des groupes financiers...
Nous devrons prendre ce temps de la réflexion, afin d’adapter notre action aux nécessités du temps présent. Mais dans l’immédiat l’urgence est de mettre à profit le sursis que nous avons arraché grâce à l’union au sein du NFP, afin d’enrayer définitivement la progression du RN et mettre en échec les manœuvres de la droite et des macronistes.
Sous prétexte d’expédier les affaires courantes, le Président de République, bien que défait dans les urnes, a maintenu Gabriel Attal dans ses responsabilités, au-lieu de proposer au Nouveau front populaire qui est le bloc le plus important à l’Assemblée nationale, de désigner le futur 1er ministre. Dans le même temps, dans une Lettre aux Français, il recommande une alliance de la droite, de la macronie et d’une partie de la gauche. Une alliance qui, au mépris du vote des électeurs, revendiquerait le poste de chef du gouvernement.
Un gouvernement Nouveau front populaire doit être constitué sans tarder afin de mettre en œuvre son programme qui est un programme de rupture, démocratique, social, écologique et de paix dans le monde. Le temps presse, c’est en effet le 18 juillet que se réunira de plein droit la nouvelle Assemblée nationale.
Nous ne devons pas édulcorer le programme du NFP. Les électrices et les électeurs ne nous le pardonneraient pas et ce serait alors la victoire assurée de Marine Le Pen en 2027 ou avant.
L’absence de majorité à l’Assemblée nationale est en gros la situation que nous aurions si les élections avaient lieu, comme nous le souhaitons, à la proportionnelle. Les débats en séances publiques de l’Assemblée permettent de formuler des amendements qui sont ou non votés. Si une majorité de députés votent contre nos propositions, ils en prennent la responsabilité devant notre peuple et ils le paieront électoralement. Nombreuses et nombreux sont celles et ceux qui y réfléchiront à deux fois et nous serons en mesure de faire voter nombre de nos propositions. Dans le pire des cas, n’excluons pas de légiférer par décrets sur les questions, comme, par exemple, le SMIC à 1 600 €.
Parmi les manœuvres de la droite et des macronistes, soyons vigilants sur leurs tentatives pour nous diviser et pour isoler la France insoumise. Celle-ci n’est certes pas sans défaut mais elle est diabolisée. Je suis d’une génération de communistes qui avait pour mot d’ordre « être unitaire pour deux ». Cela est à mon sens toujours d’actualité. Ne perdons pas de vue que si nous avons réussi à endiguer la progression du RN c’est grâce à notre union au sein du NFP et à l’intervention massive et résolue du mouvement syndical, du mouvement associatif et grâce aux nombreux appels d’enseignants, de chercheurs, de médecins, de personnalités de sensibilités philosophiques d’une grande diversité. Il serait sans doute judicieux que nous nous regroupions dans des comités locaux du NFP, au plus près de la population, afin de surmonter ensemble les obstacles que nous allons rencontrer dans l’étape tout à fait nouvelle – historique certainement - dans laquelle est engagée la France.
Bernard DESCHAMPS
10 juillet 2024