
Le Critérium des Cévennes
Sous le ciel étoilé, dans le silence et la fraîcheur de cette fin de nuit, des lampes torches comme des feux follets ont commencé à s’agiter, éclairant les premières toiles de tentes qui s’installaient dans le pré à l’entrée du chemin de Briontet. Les Cévennes encore endormies, surprises par ces vas-et vient, n’en revenaient pas de cette intrusion.
Mais le pire – ou le meilleur, diront certains – était à venir. Avec le jour, des grappes humaines occupèrent les bords de la route du Marcou, montèrent à l’assaut des chemins qui la surplombent et envahirent les faïsses. Bientôt les premiers bolides firent leur apparition, annoncés par leurs lointains feulements jusqu’à leur surgissement au détour de la route, dans le crissement des pneus et le rugissement des moteurs. Monstres de verre et d’acier, rutilants, aux couleurs vives de leurs sponsors, bondissant et dérapant dans les virages.
La montagne, silencieuse et calme, était meurtrie de ce vacarme. Les pins dressés vers le ciel, figés dans leur raideur en étaient offusqués et le feuillage des peupliers en frémissait d’effroi. La Tour de Peyre, immobile, contemplait de haut ce spectacle sacrilège, d’un air réprobateur. Seuls les châtaigniers penchaient avec tendresse sur les spectateurs, leurs bras chargés de bogues grosses de leurs fruits.
Les Cévennes austères vivaient cette intrusion comme un viol. Attachées aux temps anciens qui les « avaient vu naïtre », elles vivaient douloureusement ce souffle de modernité qui s’abattait sur elles. Le choc de la technique et de la tradition. La suprématie de l’ingénierie sur le savoir-faire ancestral. Le triomphe de la vitesse.
Et elles protestaient. Mais la vie triompha. De ma terrasse, à l’ombre de la glycine, je me régalais du spectacle de cette foule allant et venant, saluant au passage les pilotes engagés dans la compétition.. Des rires d’enfants me parvenaient courant dans les prés, ivres de liberté, et à midi, des panaches de fumée surgirent ici et là, d’où s’échappaient d’appétissantes odeurs de grillades. La vie.
La presse locale annonce ce matin que le jeune cévenol de 19 ans Yohan Rossel, s’est classé 2e et a remporté le Championnat de France des pilotes de rallyes.
Pouillon et l’Algérie
Les éditions Macula (Paris) viennent de sortir un bel album consacré à Fernand Pouillon (1912-1986) qui, après l’Indépendance, a construit en Algérie de très nombreux immeubles. Logements sociaux, barres d’HLM couleur de sable, hôtels, bungalows blancs sur ciel bleu des bords de mer. Les photos sont de Daphnée Bengoa et de Léo Fabrizio. Les textes ont été écrits par la romancière Kaouther Adimi ( Nos richesses ; Les Petits de Décembre, le Seuil éditeur ).