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1 mars 2019 5 01 /03 /mars /2019 17:57

Les manifestations contre le 5e mandat, ce vendredi jour férié et jour de prière pour les Musulmans, ont de nouveau rassemblé des foules considérables dans toute l’Algérie. A 17h.,  les observateurs parlaient de dizaines de milliers de personnes dans le centre d’Alger, parmi lesquelles l’héroïne de la guerre d’Indépendance Djamila Bouhired qui a été chaleureusement applaudie, de même qu’Issad Rebrab, le milliardaire  propriétaire de la société d’importation Cévital, tandis que Louisa Hanoune, la secrétaire générale du PT (trotskiste) était chahutée.

Que nous disent ces manifestations ?

Fidèle à ma ligne de conduite, je me bornerai à quelques constats sans porter de jugements. Chaque peuple en effet doit être libre de décider de ses choix politiques. De quel droit donnerions-nous des leçons au peuple algérien ?

Je vais donc m’efforcer d’être aussi objectif et aussi neutre que possible.

La première constatation qui s’impose par son évidence : il s’agit des manifestations les plus importantes depuis le « printemps kabyle » de 2001 et elles se développent encore comme en attestent les appels de partis ou de personnalités qui ne s’étaient pas exprimés jusqu’alors, touchant toutes les catégories sociales avec une participation très importante de la jeunesse et des femmes. Et ceci sur l’ensemble du territoire de l’Algérie.

Deuxième constatation : l’absence de violences aussi bien de la part des manifestants que des forces « de l’ordre » qui, contrairement à d’autres époques, font preuve de beaucoup de retenue. Les observateurs sont unanimes sur ce point. J’avais fait la même constatation lors des émeutes de 2011.

Troisième constatation : les partis qui se réclament de l’Islam ne sont pas unanimes. Certains appellent ou sont dans les manifestations, d’autres leur sont opposés et, contrairement au soulèvement des années 80-90, ces manifestations n’ont pas une tonalité religieuse.

Enfin, quatrième constatation et c’est peut-être la plus importante : l’affrontement se circonscrit à une seule question : pour ou contre un 5e mandat du Président Bouteflika. Les observateurs notent que ce n’est pas la personnalité du Président qui est en cause – Benjamin Stora disait la même chose ce matin sur BFM TV -  c’est l’idée même d’un 5e mandat qui choque les Algériens. Le retrait d’Abdelaziz Bouteflika est leur objectif quai exclusif. Pour quelle politique ?

On remarquera que ni les formations favorables au 5e mandat ni leurs adversaires – à part quelques rares exceptions très minoritaires – ne s’affrontent sur le terrain de la nature économique et sociale du régime.  Le PADS (communiste) qui considère comme légitime cette colère de la rue, fait remarquer dans une déclaration publiée le 27 février (voir sur ce blog) : « En lutte les uns contre les autres, les clans du régime ainsi que leurs opposants bourgeois, sont tous d’accord pour ravaler la façade politique «  et  « mettre la main sur  toute source d’enrichissement échappant encore à sa soif d’accumulation d’argent et de domination […] Le plan est prêt. Non seulement les lois anti-ouvrières telles que la loi anti-grève de 1990 seront maintenues, mais elles seront complétées par d’autres avec la révision du code du travail et de la loi sur les retraites. Des mesures aggravant la paupérisation et les inégalités sociales […] privatisation super rentable de Sonelgaz, la suppression de la subvention des produits de première nécessité… », etc. Ce serait, selon ce parti, l’objectif de la « conférence inclusive » promise par le Président Bouteflika dans sa déclaration de candidature.

Pour leur part, en ordre dispersé, le FFS (socialiste) se prononce en faveur «  d’une assemblée nationale constituante » ;  le PT (trotskiste) pour «  une assemblée constituante permettant au peuple d’exercer sa  souveraineté» ; le RCD (laïc) pour « la constitution d’un gouvernement de salut national » ; le PADS (communiste) pour « un régime socialiste ».

 « Un seul  héros le Peuple » disaient les inscriptions murales en 1962. Le peuple algérien n’a pas dit son dernier mot dans cet affrontement planétaire qui, en ce début du 21e siècle, oppose les peuples aux puissances financières mondialisées dont ils contestent la domination.

Bernard DESCHAMPS

1er mars 2019

(Photo de Djamila Bouhired dans la manifestation d'Alger ce vendredi 1er mars 2019)

 

 

 

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