Les dits, les impasses et les sous-entendus de la presse sont toujours révélateurs, pas forcément de l'opinion publique, mais surtout des objectifs des faiseurs d'opinion. C'est l'objet de ce papier. Mais d'abord, par honnêteté et afin que chacun se fasse sa propre idée, rappelons ce qu'a déclaré le Président Bouteflika.
En premier lieu, il a procédé à un rappel des réalisations et des décisions de l'Etat algérien depuis, en gros, dix ans: la politique de "réconciliation nationale" certes critiquée, mais qui, on ne peut le nier, à ramené la paix après la "décennie de sang"; les grands chantiers entrepris et certains terminés; la construction de logements; depuis janvier 2011: "un nouveau mécanisme de stabilisation des prix" et la levée de l'état d'urgence. Cette partie du discours a été complètement "oubliée" par certains journaux aussi bien en Algérie qu'en France.
Il a également affirmé que "tout ne va pas pour le mieux", citant "la corruption, le népotisme et les gaspillages" J'aimerais entendre Sarkozy, Liliane Bettancourt et Eric Woerth tenir le même langage..Il s'est dit sensible aux "aspirations des jeunes [...] à une meilleure gouvernance" et il se sent "interpellé pour opérer les réformes socio-économiques et politques". Il est évidemment de bonne guerre pour l'opposition en Algérie de mettre en doute l'affichage de ces bonnes intentions
Il s'est engagé à:"
- construire "deux millions de logements dont un million seront délivrés avant 2014" et poursuivre les grands
chantiers d'infrastructures et de développement économique.
- "procéder à une profonde révision de la loi électorale" pour "mettre notre système électoral aux normes les plus
modernes des démocraties représentatives"
- "A cette fin tous les partis qu'ils soient représentés ou non au parlement seront mis à contribution"
- "La révision de la loi sur les partis politiques à travers la révision de leur rôle, de leur mission et de leur organisation"
Ce à quoi l'opposition objecte que ce n'est pas le rôle de l'Etat de décider du rôle, des missions et de l'organisation des partis politiques. La même critique est formulée à propos du mouvement associatif.
- "Une commission constitutionnelle à laquelle participeront les courants politiques agissants et des experts en droit constitutionnel" formulera des propositions au chef de l'Etat qui soumettra celles qu'il retiendra, au vote du
Parlement ou par voie référendaire.
- ouvrir les médias lourds "aux différents courants de pensée" et "dépénaliser [...] les "délits de presse"
- "un meilleur développement local"
Tout cela d'ici les prochaines échéances électorales, donc dans le laps de temps d'une année.
Des journaux algériens ont approuvé ce discours à la Nation. D'autres l'ont critiqué, faisant preuve, comme l'a indiqué avec humour le Président Bouteflika "de l'audace dans le ton qui les caractérise". Ce qui est le moins que l'on puisse dire, au vu des qualificatifs employés par certains. Curieusement les médias français, y compris un journal auquel je tiens L'humanité, n'ont retenu que les critiques les plus acerbes. Ce qui constitue une pression sur le lectorat français qui a ,de ce fait ,une image déformée, voire diabolisée de l'Algérie et de ses dirigeants.
C'est aussi une pression des médias français sur l'Algérie. A cet égard, nul n'a relevé, cette phrase du Président Bouteflika: "...l'Algérie réaffirme son attachement à la souveraineté des pays frères et à leur unité, son rejet de toute ingérence étrangère et son respect de la décision de chaque peuple découlant de sa souveraineté nationale". Cette déclaration de principe est conforme à l'article 1er de la Charte de l'ONU que celle-ci bafoue en soutenant les interventions militaires"occidentales" en Irak, en Afganistan, en Côte d'Ivoire et en Libye., faisant ainsi peser une menace sur tous les Etats du Maghreb et d'Afrique dont les richesses sont convoitées par les anciennes puissances coloniales. L'Algérie qui soutient le Peuple palestinien,; qui refuse l'Africom; qui est tentée par le "patriotisme économique" que le FMI et la Banque Mondiale ont en horreur, n'est pas l'abri de telles ingérences qui existent déjà, mais de manière feutrée et qui ont conduit, à partir des années 1980, à privatiser de larges secteurs économiques avec les conséquences sociales désastreuses que le Peuple algérien connait aujourd'hui. Mais les milieux financiers internationaux veulent aller plus loin et achever la conversion à l'économie de marché. Ils n'acceptent pas que l'Algérie ait repris la majorité dans la SONTRACH et qu'elle ne privatise pas plus vite tous les secteurs économiques...et les autres. Ils exigent par exemple la privatisation de la Télévision, sous prétexte de liberté. Nous constatons que ce sont les partis et les journaux algériens qui s'inscrivent dans cette orientation du "tout marché" et de la "concurrence libre et non faussée" qui ont les honneurs des média français.
Le Peuple algérien est un Peuple instruit, aux longues traditions de lutte et qui a tiré les leçons de la "décennie de sang" . Il saura déjouer, j'en suis convaincu, toutes les manoeuvres dont il est la cible.