Chaque Panorama a son caractère propre. Celui-ci fut sans doute le plus engagé et un des plus modernes au plan cinématographique. Il a permis au public de découvrir ou de redécouvrir des aspects ignorés ou insuffisamment connus des crimes du colonialisme : de l’utilisation des cuves à vin comme chambres à gaz, à l’écrasement d’une culture traditionnelle dont la richesse avait illuminé le moyen-âge sud-européen. Jean Asselmeyer qui, avec l’aide d’El Hadj Bensalah, en était le programmateur, Rachid Benallal, Moussa Haddad, Mariem Hamidat, Saïd Mehdaoui, Abderrahmane Mostefa et Damien Ounouri, nous ont livré leur regard sur 132 ans de domination coloniale française. Parmi ces réalisateurs de générations différentes, le plus jeune ayant trente et un ans, certains ont vécu la guerre de 1954 à 1962, d’autres en ont eu connaissance au travers des récits familiaux complétés par leurs lectures. C’est peut-être un des aspects qui caractérisent la renaissance du cinéma algérien après la décennie noire. De jeunes réalisateurs explorent avec un regard neuf, le passé révolutionnaire de leurs aînés, comme Damien Ounouri, qui reconstitue le parcours d’un oncle, militant de la Fédération de France du FLN et membre d’un groupe de choc. Les questions qu’ils se posent ne sont plus celles de la légitimité du combat pour l’indépendance, pour eux évidente, mais comment les combattants algériens vivaient cette nécessité – hors de la normalité – de donner la mort dans un affrontement armé d’une cruauté indicible. Comment leurs enfants, et aujourd’hui leurs petits enfants, reçoivent-ils ces révélations ? Et pendant la guerre, comment les enfants eux-mêmes, les Yaouled, vivaient-ils cet affrontement qui n’était pas circonscrit aux adultes ?
Ces trois jours de projections nous ont révélé quelques pépites, dont le public des salles commerciales est malheureusement privé, car les distributeurs français les ignorent. C’est le cas notamment du film de Mariem Hamidat sur la destruction par la France d'une partie du patrimoine culturel deTlemcen, dont la beauté des images n’a d’égale que la poésie du très beau texte qui l'accompagne.
Nous avons eu la chance de bénéficier de la participation de l'éminent historien Gilles Manceron qui, à l’occasion de chacune des œuvres, nous a resitué les situations et les faits évoqués dans leur contexte historique.
Près de 800 spectateurs ont participé à ce 7ème Panorama à Nîmes, Alès, La Grand’Combe et Aigues-Mortes, en seulement trois jours au lieu de huit les années précédentes.
Seuls le Conseil général du Gard et l’Ambassade de France à Alger nous ont aidés financièrement. Les salles ont été mises gracieusement à notre disposition par le Conseil général, les Mairies de Nîmes et de La Grand’Combe et par les Bâtiments de France. L’essentiel du financement de cette manifestation provient des cotisations des adhérents de France-El Djazaïr, de leurs dons et de ceux de nos amis. Tous les militants engagés dans cette aventure sont bénévoles. Celle-ci était soutenue par l’Amicale des Algériens en Europe (Gard), l’Association Azur (Nîmes), France Palestine Solidarité (Nîmes), Grand Ecran Pour Tous (Aigues-Mortes), l’Association Mille Couleurs (Nîmes), Le Mouvement de La Paix (Nîmes), Solidaires 30, le Tel Quel Théâtre (Nîmes) ainsi que par les cinémas Les Arcades d’Alès avec la programmation qu'ils avaient choisie.
Répétons-le, ce 7ème Panorama a failli ne pas voir le jour en raison du refus de la DRAC et de plusieurs collectivités territoriales, de nous attribuer les subventions qu’elles nous accordaient les années précédentes. Nous avons relevé le défi et un public fidèle nous a soutenus. L’aventure continue donc. Vive le 8ème Panorama qui aura lieu en 2014 !
Bernard DESCHAMPS
Président de France-El Djazaïr
En tête, photo de Damien Ounouri à Aigues-Mortes.
Ci-dessous, photo prise par Saïd Mehdaoui: les organisateurs.