Objet : La suite à donner à l’inauguration d’une stèle dans la Caserne de Pau à la gloire d’un officier déserteur ayant été condamné à mort Monsieur le Président, Monsieur le Ministre,
Le 6 octobre dernier 2010 j’interpelais le Ministre de la Défense au sujet de l’inauguration officielle du monument à l’effigie du Colonel Pierre Château-Jobert à Pau, au pied du mât des couleurs de l’ancienne place des agrès de l’ETAP, inauguration qui s’y est déroulée le 22 octobre.
Or il n’est pas inutile de rappeler le passé sulfureux de cet officier, le Colonel Pierre Château-Jobert :
Il se solidarise avec les officiers qui, le 22 avril 1961, autour du général Challe, ont saisi le commandement à Alger. Ce qui lui vaut plusieurs mois d’arrêts de forteresse pour ce putsch qui tenta de renverser la République Française.
Il déserte en janvier 1962 pour rejoindre le commandement de l’OAS dans l’est algérien
Il est condamné à mort par contumace en 1965 et ne rentrera en France de son exil qu’en 1968, après la première amnistie.
Certes ce fut un résistant pendant la seconde Guerre Mondiale, mais avec un tel palmarès comment est-il compatible que cet officier, déserteur, condamné à mort, ayant tenté de renverser la République puisse être honoré ? Est-ce l’exemple qui doit être donné aux nouvelles recrues de l’Armée Française en formation ?
Lors de cette inauguration du 22 octobre 2010, sur les sites internet des associations ayant soutenu, organisé cette manifestation, on pouvait lire ces extraits, dans l’éloge qui lui fut rendu : "Rapidement prenant position sur la politique d’abandon : Affecté au Niger en février 1961, il se solidarise avec les officiers qui, le 22 avril 1961, autour du général Challe, qui ont saisi le commandement à Alger, ce qui lui vaut plusieurs mois d’arrêts de forteresse.
Rien ne le fait changer dans sa position : il rejoint clandestinement l’Algérie et se met aux ordres du général Salan, chef de l’OAS. En charge du Constantinois, il y retrouve le lieutenant Michel Alibert et y noue, en vue de leur ralliement, de nombreux contacts avec des officiers supérieurs et subalternes des régiments qui y sont stationnés, 13ème Dragons, 6ème Cuirassiers et 2ème REC (Le général Multrier, commandant de la zone Est Constantinois dira : "l’OAS progresse vite dans le Constantinois quand Château-Jobert en prend la tête"). Clandestin, en Métropole, en Algérie et en Espagne, il continue son combat.
En 1965, il est condamné à mort par contumace.
Il revient à Morlaix le 3 novembre 1968, après la première amnistie de juin 1968. Il poursuit son action aux plans politique, social et spirituel en publiant plusieurs ouvrages d’analyse et de réflexion."
A cette manifestation était présente l’association ADIMAD-OAS qui a réalisé un reportage publié sur plusieurs sites internet. Je vous joins 2 photos significatives que l’on y retrouve :
Cette première représente la bannière de cette association sur laquelle on peut y lire : "Les anciens détenus et exilés politiques de l’Algérie Française – ADIMAD"
Cette seconde avec le drapeau de l’Adimad-OAS et la bannière portée par son président Jean-François Collin. (le 2ème à gauche de la photo).
Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, je me permets de vous rappeler, au cas où vous ne le connaîtriez pas, le passé de ce président actuel de cette association, J-F Collin. Georges Fleury, dans son le livre très documenté "Histoire secrète de l’OAS" (disant : "Moi aussi, j’ai été ’Algérie Française’") le présente, à la page 566 : "Ce jeune sous lieutenant du groupement des commandos parachutistes a participé sous les ordres du Capitaine Murat à la prise du Palais d’été d’Alger au soir du 22 avril 1961. Sous le nom de code "Valentin" il a repéré que Yves Le Tac(1) était hospitalisé au Val de Grâce à Paris. Il participera à une première tentative d’assassinat, reportée au tout dernier moment, et ce n’est que par miracle que ce gaulliste échappera à l’attentat du 18 février 1962 (2) perpétré par le commando dirigé par le lieutenant Godot, et préparé avec l’aide de JF Collin. JF Collin a été emprisonné à l’Ile de Ré pour ses activités dans l’OAS. Il a fait partie du "Maquis de l’Ouarsenis", cette organisation militaire de l’OAS qui rêvait de pouvoir ré-éditer le putsch manqué d’avril 1961 et de remettre en cause le cessez-le-feu du 19 mars 1962. Accessoirement, il a été également été élu conseiller municipal du Front National à Hyères (83).
C’est cette association, l’ADIMAD-OAS, qui a érigé, avec la complicité d’élus, des stèles comme à Perpignan, Béziers, Marignane… faisant l’apologie des criminels de l’OAS condamnés à mort et exécutés pour leurs crimes, et qui les présente comme des "héros". Il y a quelque temps elle annonçait le chiffre d’environ 1200 adhérents dont plus de 900 condamnés pour leur activité au sein de l’OAS.
Cette cérémonie, comme nous devions le craindre, se révélât donc bien être une cérémonie :
A la gloire de l’OAS
A l’incitation à la désobéissance des militaires
A la justification de s’organiser pour mener des putschs contre la République
A une apologie du crime terroriste.
Évidemment, vous n’avez aucune responsabilité dans cette infamie, c’est le précédent gouvernement qui s’est rendu complice dans cette forfaiture républicaine.
Aussi, aujourd’hui, mon intervention auprès de vous, c’est de confirmer ce slogan : "Le changement, c’est maintenant". Il serait dans l’honneur de notre pays de "corriger" une telle provocation. Cette stèle doit disparaître de cette caserne de Pau, où sont justement formées les nouvelles recrues, en principe pour défendre notre patrie, pas pour y mener un coup d’état militaire. Une telle remise en cause des valeurs républicaines de la France n’est pas tolérable.
J’espère donc Monsieur le Président, Monsieur le Ministre que vous pourrez stopper immédiatement cette infamie :
en faisant modifier l’appellation de cette place (en lui donnant, par exemple, le nom du Général Jacques Pâris de Bollardière, un autre para, honneur, lui, de l’Armée Française) et pourquoi pas y ériger une stèle à sa mémoire ?
en faisant disparaître cette stèle : en la rendant à l’Association des paras initiateurs de cette odieuse manifestation et qu’elle ne puisse plus être visible que dans le domaine privé.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, mes plus respectueuses salutations.
Henri POUILLOT.
(1) Yves le TAC était le frère du ministre Joël Le TAC, il était aussi Compagnon de la libération. Il était hospitalisé au Val de Grâce parce qu’il avait été blessé lors d’un attentat OAS à Alger en voulant prendre sa 2CV qui a explosé. (2) Au cours de la seconde tentative, un gendarme a été tué par ce commando OAS