Admis, mercredi 3 octobre, dans un état jugé critique à l’hôpital militaire d’Aïn-Naâdja, l’ancien président de la République, Chadli Bendjedid, a rendu l’âme hier samedi. Il souffrait d’un cancer du rein qu’il soignait depuis 2011, date de sa détection.
Sofiane Aït Iflis - Alger (Le Soir d'Algérie) - L’état de santé de l’ancien président de la République a commencé à décliner depuis au moins une année. Son cancer du rein a été détecté en 2011, lors de l’établissement d’un bilan de santé dans un hôpital parisien. Les soins qui lui ont été prodigués depuis n’ont pas eu raison de la pathologie. En mai 2012, il a été évacué dans un hôpital parisien où il aurait subi une ablation du rein. Mais cela n’a pas empêché la métastase de la tumeur qui lui aurait rongé les os et l’estomac. A son admission mercredi à l’hôpital militaire de Aïn-Naâdja où il a rendu l’âme trois jours plus tard, il avait déjà sombré dans le coma. Le président Chadli a tiré sa révérence à l’âge de 83 ans. Né le 9 juillet 1929, il a fait carrière dans l’armée où il a atteint le grade de colonel. A la mort du président Houari Boumediène en décembre 1979, le consensus militaire, laborieux, il faut le dire, tant féroce était la guerre de succession, le désigna pour présider aux destinées du pays. Ses pairs d’entre les hauts galonnés de l’armée choisirent en lui l’officier le plus ancien au grade le plus élevé. Son intronisation est intervenue le 7 février 1979. Son règne, long de 13 ans, n’a pas été une sinécure. Moins d’une année après sa désignation à la tête du pays, il s’est retrouvé face à une poussée du mouvement social et politique alors contraint à l’activité clandestine. Le Printemps amazigh en avril 1980, puis les émeutes de Constantine en 1986 et le soulèvement d’Octobre deux années plus tard, soit en 1988, finiront par lui imposer de lâcher du lest et de consentir à une ouverture qui permit l’émergence d’un pluralisme politique et d’une presse tout aussi plurielle. La conjoncture économique également n’était pas propice pour un quelconque essor. Les chutes drastiques des prix du baril de pétrole le figèrent dans son effort économique. C’est encore sous la pression de contingences qu’il délaissa l’option socialiste, sacerdoce cher à Houari Boumediène, pour engager des réformes économiques, inspiré, par ailleurs, par la perestroïka de Michael Gorbatchev en Union soviétique. Le coût de cette réorientation économique était immense, puisque, étouffée financièrement, l’Algérie dut consentir à un rééchelonnement de sa dette extérieure. Le reprofilage de cette dette, terme en usage à l’époque, générera un coût social, avec son lot de licenciements et de fermetures d’entreprises économiques. C’est dans cette situation de marasme économique que surgit la menace islamiste. Agréé en 1989, dans le sillage de l’ouverture du champ politique à l’initiative partisane, le FIS partit, dès 1990, à l’assaut de la République. Chadli Bendjedid devait faire face, dès l’été 1991, à une crise encore plus accentuée que celles qu’il avait eu à affronter auparavant. Cette fois-ci, ce n’est plus à un mouvement revendicatif qu’il fit face mais à un fascisme rampant, pressé d’assener le coup de grâce à la République. La crise de l’été 1991 n’allait pas être sans conséquences sur la magistrature de Chadli. Elle l’écourtera. Chadli est poussé à la démission. Il en fera l’annonce dans un court message télévisé le 11 janvier 1992. La démission de Chadli et l’interruption du processus électoral évitèrent une prise de pouvoir par le FIS qui, d’ailleurs, a vite accéléré son insurrection armée, l’action terroriste, en somme. Parti du pouvoir, Chadli s’est efforcé de rester à l’écart de la vie politique. On ne lui connaît pas d’interventions publiques, hormis son témoignage dans un colloque dans la wilaya d’Et-Tarf consacré à l’histoire de la base de l’Est durant la guerre de Libération. Un témoignage qui, on s’en rappelle, a suscité une vive polémique. Partageant son temps entre Oran et Alger, Chadli s’était mis à écrire ses mémoires, lesquelles devraient paraître le 1er novembre prochain. Avec le décès de Chadli Bendjedid, c’est le second ancien président de la République, après Ahmed Ben Bella, à disparaître en 2012.
S. A. I.