LE MONDE AFRIQUE
En Algérie, les autorités ordonnent la fermeture de l’association chrétienne Caritas. Contrainte de mettre fin aux activités de son service caritatif, l’Eglise catholique en Algérie veut poursuivre « sous une autre forme » sa mission humanitaire dans le pays.
Par Célia Zouaoui(Alger, correspondance)
Publié hier
Le service humanitaire Caritas Algérie, déployé par l’Eglise catholique à travers le pays depuis soixante ans, est contraint de cesser son activité à partir de samedi 1er octobre. Les autorités ecclésiales locales expliquent dans un communiqué publié mardi 27 septembre que cette décision a été prise « conformément à la demande des pouvoirs publics ». Motif : Caritas Algérie serait « une organisation non autorisée ».
Depuis février, le diocèse d’Alger a tenté sans succès de convaincre l’administration algérienne que ce service caritatif n’était pas une ONG. « Caritas n’est pas une organisation distincte mais l’un des services développés par l’Association diocésaine d’Algérie (ADA), il n’a donc pas d’existence juridique propre, a expliqué au Monde l’archevêque d’Alger Jean-Paul Vesco. (…) Nous avons pensé qu’il y avait une confusion avec le réseau mondial Caritas, c’est pourquoi ces derniers mois nous n’utilisons plus ce nom durant nos activités mais cela n’a pas suffi. Nous ne souhaitons pas entrer en conflit avec les autorités. »
Créé quelques jours avant la proclamation de l’indépendance du pays en 1962, Caritas Algérie était connu du grand public pour ses initiatives socioculturelles, ses projets de solidarité en faveur des personnes vulnérables et des plus démunis ainsi que ses programmes de sensibilisation au respect de l’environnement.
En collaboration avec le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et d’autres structures locales, les membres de ce service caritatif chrétien intervenaient également auprès des migrants en provenance d’Afrique subsaharienne, en leur procurant de l’aide médicale, des cours d’alphabétisation et des cours de soutien scolaire. « Peut-être étions-nous devenus trop importants », s’interroge l’archevêque d’Alger.
« C’est un moment douloureux »
Avec la fermeture forcée de Caritas Algérie, l’Eglise catholique d’Algérie veut poursuivre « sous une autre forme » sa mission caritative. « C’est un moment douloureux, pénible, dur. Mais l’Eglise catholique a souvent eu à se réinventer. C’est une nouvelle étape qui commence. On va continuer à faire du bien sans faire de bruit », avance l’archevêque d’Alger.
L’annonce de la disparition imposée de Caritas Algérie a suscité un grand émoi auprès du public. Sur les réseaux sociaux, de nombreux internautes ont déploré une « nouvelle triste » et « regrettable ». « C’est un coup de massue », se désole ainsi Fatiha, une artiste algérienne qui a participé à plusieurs expositions-ventes, organisées par Caritas Algérie. « Ils faisaient beaucoup pour la promotion de la culture à travers ses expositions et projections. C’était un lieu magique, enrichissant et surtout très humain », déplore-t-elle.
Nacéra, une jeune femme originaire de Tlemcen, qui a suivi une formation aux premiers secours dans la maison diocésaine à Alger, dispensée par Caritas Algérie, est également affligée par une « décision arbitraire et incompréhensible. Leur travail était remarquable, surtout leurs efforts pour aider les plus pauvres, les personnes handicapées et celles atteintes de la maladie d’Alzheimer ».
Célia Zouaoui(Alger, correspondance