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19 avril 2022 2 19 /04 /avril /2022 10:07

Le quotidien Liberté Dz était certes un média du milliardaire Rebrab, avec tout ce que cela implique de propagande de classe, mais il était un élément du pluralisme politique. Sa disparition n’est pas une bonne nouvelle. La liste est longue  des journalistes bâillonnés, des médias algériens en difficulté comme El Watan ou contraints comme Alger républicain, il y a quelques années, d’abandonner la version papier et réduits à la version électronique. Bernard DESCHAMPS

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Déclaration d’Issad Rebrab,

 14 Avril 2022 à 12:00

Chers collègues, chers amis, chers lecteurs et chers concitoyens.

C'est avec beaucoup d'émotion que je m'adresse à vous aujourd'hui. J'ai passé près de 30 ans de ma vie à vos côtés à travers ce journal, et en dépit des moments difficiles que nous avons pu traverser, je peux affirmer que j'ai vécu cette période avec beaucoup de plaisir.

Ma décision d’arrêter le journal Liberté a soulevé une vague d’émotion et de protestation. Je comprends le sentiment de ceux, si nombreux, qui refusent de consentir à l’extinction d’un support dévoué de la liberté d’expression, d’une citadelle de lutte démocratique et d’un témoin qui a accompagné, jour après jour, un long épisode de l’Histoire récente de notre pays.

Aux concitoyens et amis du journal ayant exprimé leur souhait de voir sa parution se poursuivre et à ceux n’en ayant pas compris les motifs, je confirme que sa situation économique ne lui permet qu’un court et vain sursis. Ce quotidien d'information a été proposé à la vente mais il a été victime, comme beaucoup de supports de presse, de l’évolution mondiale des comportements des lecteurs qui s’oriente vers la presse électronique. Le problème procède autant de l’état général récessif de la presse papier que du contexte commercial qui prive le journal de la contribution de vitales annonces publicitaires et de l’amenuisement accéléré du lectorat. Depuis un temps, le journal est distribué à perte. Et la perspective n’est point encourageante. La décision est aussi à replacer dans un contexte plus large d’évolution dans l’organisation des activités que j’ai, jusqu’ici, initiée et dirigée.

Depuis plus d’une année, j’ai placé le groupe Cevital dans une perspective d’un nouveau départ devant faire suite à mon retrait de la vie active que mon âge a rendu nécessaire et que j’annoncerai prochainement.

Les modestes réalisations dont je suis l’initiateur et le promoteur m’ont demandé une vie d’efforts et de sacrifices. Au moment où je prends enfin une retraite effective, j’ai voulu faire en sorte que la relève qui me succédera puisse se consacrer au seul impératif de développement des activités industrielles du groupe, libérées des contraintes particulières de gestion d’une entreprise de presse.

C’est au demeurant le souhait légitime de mes successeurs. Au moment où prend fin l’exaltante aventure collective autour de Liberté, je tiens à saluer le geste de nombreux intellectuels, femmes et hommes politiques, de lettres et de culture qui ont appelé à sa préservation. Ce quotidien a été une belle aventure, enrichissante et fructueuse pour tous ceux qui ont contribué à son élaboration. Il a su porter le combat pour la défense de toutes les libertés. La multitude de sujets qui ont été traités dans les rubriques phare du quotidien a permis de diffuser des informations capitales à grande échelle, touchant un large public.

Je tiens particulièrement à exprimer ma reconnaissance aux générations de lecteurs de Liberté qui, par leur présence, lui ont constamment donné sa raison d’être et, dans les moments les plus difficiles, lui ont fourni la meilleure raison de résister et de persévérer.

Je tiens aussi à rendre hommage aux générations d’employés qui y ont successivement partagé l’exigeante tâche de confection quotidienne du journal et fait de lui l’œuvre impérissable qu’il est.

Je m’incline devant la mémoire de ceux d’entre eux qui, sous les balles assassines du terrorisme, ont payé de leur vie la cause de progrès et de démocratie qu’il a toujours défendue. J’ai une pensée attristée pour d’autres parmi eux qui ont eu à subir l’épreuve imméritée de la prison. Je remercie enfin les différents partenaires, annonceurs, imprimeurs et diffuseurs qui ont participé à sa réalisation.

 

Issad REBRAB

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LA MISE EN GARDE DE LOUISA HANOUNE

“Ne brisez pas cet espoir”

Publié 05 Avril 2022 à 12:00

La nouvelle est tombée tel un couperet.

Le conseil d’administration du journal Liberté, dont vous êtes propriétaire, va se réunir mercredi 6 avril courant pour décréter la disparition de ce journal. L’incompréhension et la stupeur mêlées d’émotion ont vite cédé la place à l’indignation et à la colère. Mais une telle nouvelle est si invraisemblable par sa violence que nous avons du mal à y croire.

Envisagez-vous réellement la mise à mort du journal Liberté ? Depuis la publication de cette sinistre information, nous sommes assaillis d’appels, y compris de l’étranger, notamment des pays francophones, de journalistes et de militants amis pour qui le quotidien Liberté est une source d’information fiable sur la situation de notre pays. En effet, le quotidien Liberté est une référence sérieuse et crédible sur le plan tant national qu’international. Mais pourquoi ? Quels motifs gravissimes pourraient dicter une telle mesure irrémédiable ? Certes, vous êtes fondé à prendre les décisions qui concernent le sort du journal en votre qualité de propriétaire. Problème de financement ?

Il est vrai que Liberté compte parmi les journaux qui, ayant conservé, malgré les pressions diverses, une indépendance bien que relative, considérant les menaces qui pèsent sur la presse en général, ont été sanctionnés par la privation de toute publicité publique distribuée généreusement à des médias quasi inexistants, qui ont accepté de se soumettre pour devenir des instruments au service de la propagande gouvernementale. Mais pardonnez notre doute. Nous avons du mal à admettre que le manque de financement puisse être à l’origine d’une décision extrême que le conseil d’administration s’apprête à entériner. Cela parce que, comme toutes les Algériennes et tous les Algériens, nous connaissons l’histoire du journal Liberté. Et si c’était le cas, ne serait-il pas possible de faire appel à souscription pour sauver le quotidien Liberté ? N’est-il pas envisageable de permettre aux journalistes de le reprendre ?

Nous en sommes convaincus, les Algériennes et les Algériens, lecteurs de quotidien Liberté, malgré la situation sociale dramatique dans laquelle ils se débattent majoritairement, consentiraient des efforts douloureux pour assurer la survie de leur journal.

Monsieur Issad Rebrab,

Faut-il vous rappeler qu’un journal n’est pas la propriété exclusive de ses actionnaires ou de son propriétaire, qu’il est aussi la propriété de ses lecteurs qui lui ont donné la place qu’il occupe ? Ce qui en fait un patrimoine national. Et le quotidien Liberté occupe une place centrale dans le spectre des médias nationaux, une place qu’il a arrachée dans un combat qui dure depuis 30 ans, traversant et accompagnant les dures épreuves que notre pays a subies et grâce à la qualité de son contenu, du professionnalisme de ses journalistes, à leur éthique, leur persévérance. Oui, le journal Liberté appartient aussi à toutes celles et à tous ceux qui, comme nous, cherchent l’information crédible, le journalisme honnête qui leur permet d’être au fait des développements, afin de pouvoir se faire une opinion et éventuellement agir. Par conséquent, la liquidation annoncée du quotidien Liberté est une attaque insupportable contre chacun d’entre nous.

Monsieur Issad Rebrab,

Nous avons le droit, tous les lecteurs du journal Liberté ont le droit de savoir quelles sont les vraies raisons qui sont à l’origine de la menace de disparition du quotidien Liberté. Car ce journal compte parmi les très rares survivants – en tant que journal sérieux et non clientéliste ou courtisan – de la régression sur le terrain des libertés. Oui, par-delà sa ligne éditoriale, le quotidien Liberté n’a pas succombé au chant des sirènes de la contre-révolution et de la réaction. Il est resté le journal progressiste de la résistance, le porte-voix des sans-voix, des victimes de l’injustice et d’arbitraire, mettant à nu les régressions… Mais aussi celui des luttes et donc de l’espoir. Il est resté le porte-voix des travailleurs et des retraités, des couches vulnérables, des harraga, relatant la détresse des familles sans nouvelles de leurs enfants disparus… Le porte-voix de la douleur des familles de détenus politiques… Journal d’investigation et d’analyse, tribune libre pour le débat large, Liberté a toujours été un défenseur acharné des causes justes dans le monde. Et Liberté est un journal patriotique, car poser les problèmes, c’est aider dans leur résolution et donc éviter au pays le délitement de son tissu social national qui mène au chaos dislocateur. En effet, seuls ceux qui ont intérêt à voir notre pays sombrer se taisent face aux problèmes pour entretenir les processus de somalisation qui ont fait des ravages

notamment sur notre continent.

C’est pourquoi nous pensons que sa disparition est une affaire nationale et que les autorités ne sauraient rester indifférentes.

Monsieur Issad Rebrab,

Vous n’êtes pas sans ignorer les conséquences qu’engendrerait la décision de liquider le quotidien Liberté, dans un contexte marqué par une crise politique, économique et sociale majeure.

Ce pays, déjà exsangue, peut-il supporter un autre acte volontaire qui s’apparenterait à une provocation supplémentaire ? Mais qui y a donc intérêt ? Liberté est une des dernières lucarnes par lesquelles passe encore un peu de lumière, un peu d’air dans le climat étouffant qui prend à la gorge la majorité épuisée par tant de privations. En revanche, sa liquidation encouragerait la mise à mort du très peu de journaux véritables qui résistent encore à la désertification totale de la presse libre. De ce fait, sa disparition est un facteur supplémentaire de désespoir. A contrario, Liberté est un des derniers remparts qui nous permettent de garder l’espoir de recouvrer nos libertés confisquées. Ne brisez pas cet espoir. N’emmurez pas la lucarne. N’oubliez pas que nos enfants, les générations montantes jugeront toutes celles et tous ceux qui, volontairement ou pas, auront contribué à l’avènement du pire, car fermer le quotidien Liberté pourrait constituer l’atteinte de trop.

Alors, reconsidérez votre décision. Veuillez croire, Monsieur Issad Rebrab, en notre attachement indéfectible aux acquis démocratiques.

La Secrétaire générale du PT

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La Croix

En Algérie, l’adieu au journal « Liberté »

Le régime autoritaire d’Abdelmadjid Tebboune a eu raison du quotidien, deuxième tirage francophone après El Watan. Le journal met la clé sous la porte ce jeudi 14 avril, après trente ans d’existence.

Amine Kadi, correspondant à Alger, le 14/04/2022 à 06:00 Modifié le 14/04/2022

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ET QUAND UN PARTI POLITIQUE EST ETOUFFE …

Gel des activités du Parti socialiste des Travailleurs: Le FFS (membre de l’Internationale socialiste) et le PST dénoncent

par M. M.

Suite au «gel» de ses activités par le Conseil d'Etat, le Parti socialiste des Travailleurs (PST), a dénoncé, dans un communiqué rendu public hier, un «grave précédent contre le multipartisme». «Dans un contexte de durcissement de la répression et contre toute attente, le Conseil d'Etat a ordonné hier, jeudi 20 janvier 2022, la suspension temporaire des activités de notre parti et la fermeture de nos locaux. Il s'agit d'un grave précédent contre le multipartisme et d'une atteinte supplémentaire intolérable aux libertés démocratiques dans notre pays», lit-on dans le document.

Le communiqué rappelle que la décision du Conseil d'Etat fait suite «à la plainte introduite le 26 avril 2021 par le ministre de l'Intérieur». Ce dernier «prétextant le retard pris dans l'organisation» du congrès du PST, lance «cette action judiciaire abusive», intervenue «avant l'expiration du délai de 15 jours fixé par la mise en demeure qui nous a été adressée d'une part et, d'autre part, au lendemain de la tenue, justement, de notre congrès et la transmission des documents y afférents au ministre de l'Intérieur, par le biais d'un huissier de justice». Selon le PST, cette décision du Conseil d'Etat, «vise à faire payer à notre parti ses positions politiques et ses engagements résolus dans le Hirak, contre la répression et aux côtés des luttes sociales des travailleurs et des masses populaires».

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En octobre 2021 :

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF D’ALGER PRONONCE LA DISSOLUTION DE L’ASSOCIATION RAJ

Après 28 ans d’existence, jalonnés de résistance et de luttes pour la citoyenneté, l’association Rassemblement Actions Jeunesse est dissoute suite à une procédure judiciaire engagée à son encontre par le ministère de l’Intérieur. Le FFS, le RCD, le PT et Amnesty International dénoncent un “grave” précédent.

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