Semaine du 10 au 15 janvier 2022
(Dernière mise à jour; 22 janvier 2022)
La semaine débute par le témoignage important de Fall Aziz Salmone, membre du comité international "Justice pour Thomas Sankara", qui affirme avoir, dans sa lutte pour la vérité sur le coup d’Etat du 15 octobre 1987, subi intimidations et tentatives de corruption. Il affirme que certaines choses racontées par Blaise Compaoré et ses partisans sur les évènements sont loin de la vérité. Blaise Compaoré, comme alibi, laisse entendre que souffrant du paludisme le jour des évènements, il était chez lui. Des Libériens affirment pourtant, avoir vu Blaise Compaoré au conseil de l’Entente au moment des faits. Il a également été question d’un document qui prouvait que le coup d’Etat avait été orchestré par la France dont les émissaires auraient rencontré Blaise Campaoré le 7 octobre 1987.
Le rôle de Jerry Rawlings (alors président du Ghana, ndlr) dans la prise du pouvoir de Thomas Sankara en 1983 a été évoqué. Cela n’avait pas échappé aux agences de renseignement des puissances occidentales. Des camions avaient convoyé le commando depuis la ville de Pô (Sud du Burkina) jusqu’à Ouagadougou, le 4 août 1983. Cette aide clandestine du président ghanéen avait inquiété Houphouet Boigny de la Côte d’Ivoire et Eyadéma Gnassingbé du Togo.
La France encore avec les manipulations subies par François Hauter, journaliste du journal Le Figaro qui a déclaré lors d’une conférence à Dakar que Guy Penne (Conseiller pour les affaires africaines de François Mitterrand) apprenant son projet de se rendre à Ouagadougou pour réaliser un reportage sur la révolution, en informe la direction générale de la Sécurité extérieure qui remet au journaliste un dossier compromettant contre Sankara, notamment sur « les assassinats et les tortures ».
Un témoin a rendu cet hommage émouvant à Thomas Sankara : « Thomas Sankara savait qu’il allait mourir dans cette affaire. Il était prêt au sacrifice suprême. Il croyait en ses idéaux. Il a peut-être pensé que le meilleur service à rendre à la révolution était de se laisser tuer au lieu de tuer ».
« Blaise Compaoré est celui qui a le plus bénéficié de ce coup de force. Donc, impossible que cela ait pu se faire sans son aval. "Si c’est vrai, pourquoi ne les avoir pas sanctionnés ou pourquoi les avoir gardés à son service" ?Gilbert Diendéré est certainement celui qui a supervisé les choses depuis le conseil, sous la direction de Blaise Compaoré. »
Mitterrand a-t-il été le complice de l’assassinat du Président de Burkina Faso ? Le journaliste américain Stephen Smith : « n’a jamais eu d’indice sur un rôle activement joué par la France dans ce drame. Il a toutefois déclaré que la France cherchait à limiter le rayon d’action de Thomas Sankara. A l’en croire, François Mitterrand voyait en Sankara ses moments de jeunesse. « C’était comme s’il avait trouvé un bain de jouvence dans cette impétuosité de Sankara » Cela fait écho à l’opinion émise récemment par le journal l’’Humanité, selon lequel Mitterrand aurait averti Sankara des menaces qui pesaient sur lui. Vrai ou faux, cela peut être interprété de plusieurs façons. On peut imaginer que Mitterrand ait voulu, à la fois se démarquer de Chirac alors Premier ministre et de Foccard, l’ homme de la France-Afrique, et tenter d’effrayer Sankara afin de l’amener à abandonner ses projets révolutionnaires.
Après les dépositions des témoins, le tribunal a pris connaissance des pièces à convictions : vidéo, armes et munitions utilisées, expertises réalisées lors de l’autopsie complète des restes des corps des 13 victimes … « Céline Bamouni, la fille du journaliste Paulin Bamouni a pris la parole pour exprimer « la douleur et le chagrin » qu’a vécu sa famille jusqu’à l’ouverture du procès. Elle a appris le décès de son père le 16 octobre 1987. « On ne savait pas s’il était mort, s’il avait été capturé ou s’il avait réussi à fuir. Dans mon esprit d’enfant, je me disais toujours qu’il avait réussi à trouver une cachette (…) On n’a jamais vu le corps. On partait se recueillir sans savoir s’il faisait vraiment partie des victimes », « J’avais 11 ans et ma grande sœur 13. Mais mon frère n’a pas connu notre père. Quand on lui parle de notre père, il ne sait pas de qui on parle. Ma mère est morte sans savoir qui a massacré et inhumé sauvagement son mari. Elle est partie malheureuse. Elle a été traumatisée. Avec ce procès, nous avons commencé à être guérie mais la douleur est là », a conclu Céline Bamouni. »
Prochaine audience: lundi 24 janvier pour les plaidoieries.
J'ai conservé l'intégralité des comptes-rendus de presse (faso.net) que je peux vous transmettre si vous le souhaitez .Me préciser les dates des audiences.
Bernard DESCHAMPS