jeudi 9 décembre 2021
11h44
Le témoin Abderrahmane Zétiyenga nie tout lien d’amitié avec l’ancien chauffeur de Diendéré
L’audition du témoin Abderrahmane Zétiyenga se poursuit ce jeudi 09 décembre au tribunal militaire de Ouagadougou. Une confrontation entre le témoin et Tondé Ninda Pascal dit Mang Naaba a été faite.
Celui-ci affirmait au cours de son audition, qu’il était, en tant qu’ami intime du témoin, allé lui dire que Somda Eugène était entrain de lui créer des problèmes auprès du juge d’instruction. Et que si le juge l’appelait, il avait intérêt à dire qu’il était en ville au moment des faits et non au conseil de l’Entente. Il ajoute que si il a dit à Abderrahmane Zétiyenga que c’est le général Gilbert Diendéré qui l’avait envoyé, c’était pour que celui qu’il dit être son ami prenne la situation au sérieux.
Face au juge, le témoin a soutenu ne pas être l’ami de Mang Naaba comme celui-ci le clame. "Je ne connais pas chez lui, je n’ai pas son numéro", soutient-il. Mang Naaba lui réplique, qu’ils dormaient ensemble au conseil et faisaient tout ensemble. Même si il admet qu’ils se sont vus au moins un an avant sa visite chez Abderrahmane Zétiyenga.
Mais pour le président du tribunal, l’acte posé par Mang Naaba fait croire qu’il a été mandaté par quelqu’un. "Vous n’avez pas le numéro de quelqu’un, la personne ne connait pas chez vous, vous apprenez que Somda Eugène est entrain de gâter son nom et vous vous déplacez pour aller le prévenir ? Cela nous fait croire que quelqu’un vous a envoyé lui dire quoi dire lorsqu’il ira devant le juge d’instruction", a soutenu le président du tribunal. Il n’a pas manqué d’inviter Mang Naaba, accusé de subornation de témoin, à mettre plus de sérieux dans ses déclarations devant le tribunal qu’il fait balader en lui servant différentes versions.
Si dans ses premières déclarations, l’accusé avait affirmé qu’il n’avait pas dit à Abderrahmane Zétiyenga de dire au juge d’instruction qu’il était en ville et non au conseil au moment des faits, il a été obligé après l’écoute de l’enregistrement de leur conversation par Zétiyenga, d’admettre être celui qui avait tenu les propos. Il avait ensuite affirmé, qu’il avait de son propre chef pris l’initiative d’aller avertir Zétiyenga et n’avait pas été envoyé par le général Diendéré. "Vous avez le droit de ne pas répondre ou de mentir, mais le droit de foutaise au tribunal ne vous est pas acquis", l’a mis en garde le président du tribunal.
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13h17
Abderrahmane Zétiyenga, le témoin qui se culpabilise
Lors de sa déposition, le témoin Abderrahmane Zétiyenga a estimé qu’il avait été trahi par le général Gilbert Diendéré. Ce dernier qui disait détenir un message d’un complot contre Blaise Compaoré, dans la soirée du 15 octobre 1987 à 20h, avait prévu de faire arrêter le président Sankara. Mais au final, en lieu et place d’une arrestation, le conseil de l’Entente sera le théâtre d’un assassinat. Celui de treize personnes.
A la question de Me Prosper Farama de savoir si le témoin n’avait pas lui aussi trahi Thomas Sankara, Abderrahmane Zétiyenga répondra qu’il n’était pas d’accord avec l’arrestation du président mais n’y pouvait rien.
« Je suis responsable en partie pour n’avoir pas pu informer Sankara à temps. S’il y avait à recommencer, s’il fallait que je donne ma vie pour sauver Thomas Sankara et faire avancer le Burkina Faso, je n’hésiterais pas à le faire. Et si on devait me mettre en prison pour cela, cela m’amènerait à méditer », a déclaré le témoin.
Au moment où nous tracions ces lignes, l’audience avait repris avec les questions de la partie civile, après une suspension de dix minutes.
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13h18
Passe d’armes entre le général Diendéré et le témoin Abderrahmane Zétiyenga
Chaude confrontation, ce jeudi 9 décembre 2021 entre le général Gilbert Diendéré et le témoin, Abderrahmane Zétiyenga au procès sur l’assassinat de Thomas Sankara et douze autres.
Avant le drame du 15 octobre 1987, le conseil de l’Entente a abrité une réunion aux environs de 9h. Selon le témoin Abderrahmane Zétiyenga, c’est lui qui aurait suggéré la convocation de cette rencontre au lieutenant Gilbert Diendéré. Elle devait réunir les éléments de la sécurité rapprochée de Thomas Sankara et ceux de Blaise Compaoré, mais aussi les éléments de la sécurité éloignée, donc celle du conseil de l’Entente. Mais selon Zétiyenga, seul le soldat Hamidou Maïga est venu représenter la garde de Blaise Compaoré. Hyacinthe Kafando, décrit comme le chef du commando ayant assassiné Thomas Sankara et ses compagnons, était absent.
Selon toujours le témoin, il a été proposé à cette rencontre que l’on oblige Sankara et Compaoré à se retirer loin de Ouagadougou pour discuter et aplanir leurs divergences. Le lieutenant Diendéré n’aurait pas pris la parole à cette réunion. Après celle-ci, Gilbert Diendéré aurait dit à Abderrahmane Zétiyenga, en présence d’autres soldats, détenir un message de catégorie A selon lequel Thomas Sankara projetait un complot dans la soirée du 15 octobre
20h. Et pour éviter le bain de sang, Diendéré lui aurait dit qu’il allait prendre les devants en procédant à l’arrestation de Sankara.
Appelé pour la confrontation, le général Gilbert Diendéré rejettera en bloc les dépositions du témoin. Il dira au tribunal que ce n’est pas
Abderrahmane Zétiyenga qui lui a suggéré la tenue de la réunion. « Généralement les jeudis, on tient une réunion. Ce n’est donc pas la première fois que je convoquais une telle rencontre. Zétiyenga a juste suggéré que je convoque les deux gardes rapprochées parce qu’il arrive que celles-ci ne viennent pas, compte tenu des agendas des deux personnalités. Il dit que je n’ai pas parlé à cette rencontre. C’est difficile de croire que je convoque une rencontre et que je ne prenne pas la parole. Ce n’est pas possible », a déclaré le général Diendéré.
Il a également qualifié de « totalement faux » le témoignage sur la supposée information de catégorie A selon laquelle Sankara envisageait d’arrêter Blaise. « Après la réunion du matin, chacun est reparti d’où il est venu. Moi je suis parti me restaurer chez moi à la cité An 3. Je n’ai jamais reçu une note de catégorie A. Je ne peux pas prendre la décision d’arrêter le président Sankara. Ce n’est pas possible. Je ne pourrais jamais le faire. Et même si j’avais eu cette information de catégorie A comme il le dit, je n’allais jamais m’ouvrir à lui pour lui donner une information de ce genre, vu les liens qu’il avait avec Thomas Sankara. »
La confrontation s’est poursuivie sur un autre point. Selon le témoin, le général Diendéré, alors lieutenant, lui aurait donné instruction d’aller prendre position à un poste, près de la radio nationale. Il lui aurait également donné l’ordre de ne laisser entrer personne, après le passage du cortège du président Sankara. « Je ne l’ai jamais envoyé à un poste quelconque. Zétiyenga était en stage à Pô mais est revenu à Ouagadougou pour voir le président Sankara qui lui avait adressé une lettre. Il n’avait aucune fonction officielle à ce moment qui méritait que je l’envoie faire quelque chose d’important à ce poste. Aussi, le poste où il dit que je l’aurais envoyé, n’était pas le poste d’entrée officielle au conseil de l’Entente. », a déclaré le général Diendéré.
Et le témoin de répliquer « J’étais commandant de la troisième compagnie (du 1er Bataillon d’intervention rapide, NDLR). Est ce que je peux aller occuper un poste et interdire quelqu’un d’entrer au conseil. Il dit que le poste que j’ai gardé n’était pas important. Pourtant c’est par là que le président Sankara passait d’habitude. Lors de la confrontation chez le juge d’instruction, Il a dit que s’il m’a envoyé à ce poste, c’est probablement parce qu’il y avait des rumeurs sur une attaque de l’Escadron de transport et d’intervention rapide ». Après cela, le général Diendéré a tenu à préciser que la conjonction « Si » était une condition et non une affirmation. Et le président de lui dire que cela prête à confusion et qu’il aurait dû employer l’expression « S’il s’avérait que…
L’accusé a rappelé que lors de sa déposition, le témoin avait dit n’avoir pas vu le cortège du président passer par ce poste. Selon lui, ce serait une preuve que le poste que Zétiyenga gardait n’était pas important et qu’il ne l’aurait pas envoyé à ce lieu. Pour le parquet militaire, le général Diendéré aurait bien pu envoyer Zétiyenga à ce poste pour l’éloigner de la scène du drame.
Le témoin a-t-il empêché Somda Eugène d’accéder au conseil de l’Entente ? « Lorsque Somda Eugène est arrivé au poste, les éléments m’ont averti. J’ai dit de le laisser passer. Il m’a dit qu’il est venu s’enquérir des nouvelles de Thomas Sankara qui est venu au conseil pour une mini rencontre. Il dit qu’il a entendu des tirs. Comme Diendéré après les tirs n’a pas envoyé quelqu’un, je n’avais pas donc d’éléments à donner à Somda. Je ne pouvais donc pas le bloquer. J’ai demandé à un élément de l’accompagner à l’intérieur. Quand l’élément est revenu au pas de course, je lui ai demandé ce qui se passait en vain. Mais il n’a pas pu me dire un mot. Quand Somda est revenu, il était débraillé. Il était calme. C’est lui qui m’a annoncé la mort de Thomas Sankara ».
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23h19
Diendéré soutient que le témoin Abderrahmane Zétiyenga veut lui nuire parce qu’il n’a pas été fait officier
A la question d’un des avocats de la partie civile de savoir si il avait un problème particulier avec le témoin Abderrahmane Zétiyenga, le général Gilbert Diendéré a répondu par la négative. Il ajoute que même après les évènements du 15 octobre 1987, il le considérait comme"neutre" parce que n’appartenant à aucun camp.
Selon Gilbert Diendéré, les choses ont commencé à changer lorsqu’il a constaté que Zétiyenga s’était mis du côté de Hyacinthe Kafando, pour combattre les officiers. " Ils exigeaient le grade d’officier parce qu’ils estimaient avoir amené Blaise Compaoré au pouvoir. Je leur ai dit qu’ils ne remplissaient pas les conditions", explique le lieutenant d’alors. C’est dans cette ambiance qualifiée de mauvaise, que les sous-officiers auraient un jour presque séquestré 04 colonels majors.
Quelques temps après, Hyacinthe Kafando a été envoyé à un stage de deux mois pour être officier, et au regard de ses actes d’indiscipline, il devait être arrêté à son retour, mais finalement il n’est pas rentré et est parti en exil. Les éléments qui protestaient avec lui ont été sanctionnés et affectés hors du corps qui était le régiment de sécurité présidentielle.
Les officiers ont alors proposé d’affecter les sous officiers réfractaires hors du RSP et Abderrahmane Zétiyenga faisait partie de ce lot là. Il a ainsi perdu plusieurs avantages que même les officiers n’avaient pas. " Il avait une villa autour du conseil, un véhicule de fonction et bien d’autres avantages", précise le général Diendéré. "Je me suis dit que sa déposition, est une façon de me nuire. Même si il a été affecté hors du corps, je n’avais pas d’intimité avec lui", conclut le général.
Prenant la parole, Abderrahmane Zétiyenga a dit vouloir apporter des rectifications à certains propos tenus par le général. Il a précisé qu’il avait des bisbilles avec Hyacinthe Kafando, à cause du comportement de celui-ci. Et pour ce qui est de la supposée séquestration des 04 colonels majors, Zétiyenga précise que c’était plutôt une réunion convoquée par Hyacinthe Kafando pour parler de la sécurité. Zétiyenga dit même être allé faire le point de la rencontre au général Diendéré après la réunion.
Et pour ce qui est du fait qu’il veuille se venger parce qu’il n’a pas été nommé officier, Zétiyenga réplique "je ne pense pas être allé un seul jour dire au général que je voulais être officier. Le concours était ouvert et nous étions tous informés".
Armelle Ouédraogo
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