Lundi 29 novembre 2021
09h.09
Philippe Ouédraogo ne croit pas à la supposée intention de Blaise Compaoré de prendre le pouvoir en août 1983
L’audience du procès Thomas Sankara et ses douze compagnons se poursuit ce lundi 19 novembre 2021 avec le passage aux premières heures, de l’ancien ministre de l’équipement et de la communication, Philippe Ouédraogo.
A la barre à 9h09, Philippe Ouédraogo a fini son passage à 10h50. Le témoin indique qu’il avait des rapports avec les principaux animateurs de la Révolution. En août 1984, le PAI se retire du gouvernement de la Révolution (premier gouvernement) et du Conseil national de la Révolution (C.N.R). Dès lors, les responsables du PAI (Parti africain de l’indépendance) étaient des "spectateurs", dit Philippe Ouédraogo.
A partir d’août-septembre 1987, poursuit-il, "un certain nombre d’éléments devenaient inquiétants pour la survie du régime".
Le pic sera constaté à Tenkodogo avec le discours du 2 octobre (1987). Thomas Sankara y tient un discours rassembleur "en faisant une auto-critique et appelant à travailler ensemble" tandis que l’étudiant Jonas Somé prononçait un discours virulent, appelant entre autres à une démarcation vis-à-vis des "réactionnaires".
Un autre élément caractéristique de la dégradation de l’atmosphère, ce sont les tracts contre les deux premiers responsables de la Révolution, Thomas Sankara et Blaise Compaoré.
Sur le contenu de ces tracts, Philippe Ouédraogo apprend que ces écrits véhiculaient, dans un ping-pong, l’idée que ces deux personnalités étaient de "moralité douteuse" et qu’elles n’étaient pas de vrais révolutionnaires. Les tracts "attaquaient même leurs épouses", révèle le témoin.
Alors en service au Liptako-Gourma, le témoin déclare qu’en cet après-midi du 15 octobre 1987, il était à la Chambre de commerce pour la clôture des travaux d’un comité d’experts. La cérémonie devrait être présidée par le ministre Coeffé (Roger Alain Coeffé, ministre des Transports et des communications).
Entre temps, on annonce qu’il sera remplacé par Tertius Zongo, à l’époque directeur de la coopération. C’est sur ces entrefaites qu’ils seront alertés par les coups de feu, suivis des mouvements des véhicules militaires. De là, il se rend chez son ami Arba Diallo, en son temps, conseiller à la présidence. C’est de chez lui qu’il entendra les premiers communiqués. Puis le lendemain, le décès de Thomas Sankara et ses compagnons.
Le 19 octobre 1987, il est reçu autour de 11h au conseil de l’Entente par Blaise Compaoré qui lui explique la situation. Le numéro 2 aurait dit que les coups de feu ont éclaté au moment où il se disposait à se rendre à une réunion à 17h. Cette réunion devait parler de la réorganisation de l’armée, rapporte le témoin.
Philippe Ouédraogo confie également que Blaise Compaoré a signifié que "vu la situation", Boukary Lingani, Henri Zongo et lui "ont décidé" d’assumer le coup d’État.
A la demande d’une des parties d’avoir le commentaire du témoin sur l’opinion selon laquelle, Blaise Compaoré aurait, le 4 août 1983 (début de la Révolution), exprimé son intention de prendre le pouvoir, Philippe Ouédraogo émet des doutes. "Personnellement, je ne crois pas ; en tout cas, pour ce que je connais du personnage", dit le témoin, relevant cependant (et en substance) que l’être humain reste subjectif.
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Dans sa déposition, ce lundi 29 novembre 2021 devant le tribunal militaire, le témoin Philippe Ouédraogo
est largement revenu sur des points de divergence entre son parti, le PAI et la Révolution démocratique et populaire (R.D.P) plus précisément le capitaine Thomas Sankara.
Ministre des infrastructures et de la communication, d’août 1983 à août 1984, Philippe Ouédraogo et son parti, le PAI, se sont retirés dès août 1984 du gouvernement et du Conseil national de la révolution (C.N.R : organe de direction de la R.D.P).
Selon ses explications, la divergence de vue résidait dans la création d’un parti unique voulu par Thomas Sankara. Le projet devait aller très vite, précise-t-il.
Le témoin explique que le PAI n’épousait donc pas une telle démarche, car pour dissoudre un parti politique, il faut (conformément à ses textes) tenir des instances pour décider.
"Nous (PAI) avions toujours eu cette ambition d’être nous-mêmes et de dire ce que nous pensions. (...). Au départ, il était prévu que l’OMR (
Organisation des militaires révolutionnaires) soit représentée au C.N.R par huit éléments, quatre du PAI et quatre de l’ULC-R. Mais au fil du temps, le nombre de militaires gonflait dans les rencontres, jusqu’à ce qu’on se retrouve à une réunion, en juin (1984, ndlr) avec 51 militaires. Les militaires avaient une position excessive", décrit Philippe Ouédraogo, relevant que cette vision du PAI (de rester lui-même) n’était pas du goût des militaires et même des civils de l’ULC-R (Union des luttes communistes-reconstruite).
Toujours en illustration de la prééminence des militaires, Philippe Ouédraogo explique qu’alors ministre, les missions organisées par son département à l’intérieur du pays en direction des populations étaient toujours conduites par des sous-officiers.
"Thomas Sankara avait une tendance à décider tout seul, sans tenir compte de ses collaborateurs. Thomas avait cette tendance, malheureusement", relâte Philippe Ouédraogo, pour qui, cette posture a certainement contribué à exacerber la situation entre Thomas Sankara et son numéro 2, Blaise Compaoré.
Après avoir donc claqué la porte du gouvernement et du C.N.R en août 1984, le PAI n’a participé ni au Front populaire ni à la création de l’ODP/MT (
Organisation pour la démocratie populaire/Mouvement du travail) qui se voulait une sorte de regroupement de partis politiques inspiré par Blaise Compaoré.
Parlant de la personnalité de Thomas Sankara, Philippe Ouédraogo retient, entre autres, qu’il a contribué à donner d’énormes amis au Burkina. Dynamique, éloquent, Thomas Sankara était également apte à analyser les situations et à mettre vite en oeuvre ses idées, apprécie le témoin.
Pour Philippe Ouédraogo, le passage de Thomas Sankara a révolutionné la mentalité même du Burkinabè. "Si le dénouement n’avait pas été aussi dramatique, le Burkina Faso serait aujourd’hui beaucoup plus loin", regrette le témoin. "Thomas Sankara était le plus engagé, révolutionnairement, ensuite Blaise Compaoré. Dans la préparation (du 4 août 83, ndlr), chacun d’eux a joué sa partition de manière complète", juge Philippe Ouédraogo, répondant à une question sur l’engagement révolutionnaire des deux leaders.
Quant à Blaise Compaoré, poursuit Philippe Ouédraogo, il était timide "et apparemment un militaire bien apprécié".
"Un homme très sensible et susceptible, peu loquace, mais je pense que beaucoup de gens appréciaient son affabilité", dresse Philippe Ouédraogo, le qualifiant également de bon militaire.
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________________________________________________Le témoin Ernest Nongma Ouédraogo était "étranger" à tout
Ernest Nongma Ouédraogo a remplacé Philippe Ouédraogo à la barre en tant que témoin. Il est
commissaire de police à la retraite et actuel maire de la commune rurale de Tema-Bokin sous la bannière de L’UNIR- MPS (Union pour la renaissance-Mouvement patriotique sankariste).
Au moment des faits, il était ministre de l’Administration du territoire et de la sécurité dans le gouvernement du Conseil national de la révolution (CNR).
À la barre, le témoin refuse tout commentaire, il évite surtout de citer des noms et survole toutes les questions, a fait remarquer le président du Tribunal. D’ailleurs, les tentatives de ce dernier, de lui tirer les vers du nez, sont restées vaines.
Comme exemple, le président est revenu sur un témoignage qui dit que le 14 octobre 1987, Vincent Sigué, chef de la sécurité de Thomas Sankara, serait allé chercher des armes à l’Escadron de transport et d’intervention rapide (ETIR), à Kamboinssin. "Je n’en sais rien" répond brièvement l’ex-ministre en charge de l’administration du territoire et de la sécurité du CNR.
"Nous nous sommes suffisamment occupés de nos ennemis, il est temps que nous nous occupions de nos amis", cette déclaration serait de Ernest Nongma Ouédraogo, lors d’un conseil de ministres.
Selon le parquet, ce serait cette déclaration qui aurait mis le feu aux poudres. Ernest Nongma Ouédraogo ne se souvient même pas l’avoir dit, à plus forte raison de mettre la poudre à quoique ce soit.
"Je ne crois pas avoir dit cela. C’est peut-être une interprétation", se dédouane-t-il.
On peut tout de même retenir de son témoignage, qu’après les tueries du 15 octobre 1987, il a été incarcéré pendant près d’une année, dans un premier temps, à la gendarmerie et après au conseil de l’Entente.
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mardi 30 novembre 2021
10h.24
L’audition de l’ex ministre de l’Administration du territoire et de la Sécurité du Conseil national de la révolution (CNR), Nongma Ernest Ouédraogo,
n’a finalement rien apporté de nouveau à la recherche de la vérité au procès Thomas Sankara et douze autres, ce lundi 29 novembre 2021.
Après lui, c’était au tour de Mousbila Sankara, ambassadeur du Burkina Faso en Libye au moment des faits.
"Je ne peux pas dire grand chose du 15 octobre 1987, parce que je n’étais pas là. J’étais à la 49e session des nations unies à New York. C’est en pleine réunion donc que j’ai appris ce qui se passait au Burkina Faso. Ma délégation et moi, nous nous sommes tout de suite démobilisés. J’ai essayé de joindre le conseil de l’Entente. Et quand j’ai finalement eu Blaise Compaoré, il me dit en larmes : on nous a eu, j’ai été débordé. Ce que je vais te demander c’est de rejoindre ton poste et de nous aider avec du matériel de maintien de l’ordre.", relate-t-il.
Chose qu’il fit avant de se rendre compte qu’il était "berné". "Moi Mousbila, c’est ce qui me fait très mal. Je l’ai cru naïvement et j’ai fait venir du matériel en demandant au Niger et à l’Algérie, de laisser traverser leur espace aérien pour que le Burkina Faso puisse entrer très rapidement en possession du matériel. Je ne savais pas que mon bec était dans l’eau", regrette-il.
Il dit être entré au pays un certain 27 novembre 1987, incarcéré à la gendarmerie, ensuite au conseil de l’Entente du 23 décembre 1989 au 7 avril 1991. "A la gendarmerie, on ne faisait que me frapper. Après quelques mois passés à la gendarmerie, on m’a transféré au conseil de l’Entente. Mon vieux, je peux dire que mon séjour à la gendarmerie, était un séjour dans un hôtel cinq étoiles comparativement au conseil de l’Entente", déclare-t-il avec amertume.
Au conseil de l’Entente, l’ex ambassadeur du Burkina Faso en Libye soutient que les tortures y étaient inhumaines. Parmi eux, se trouvait un détenu en phase terminale du VIH Sida. D’après lui, on le rasait avec une lame et c’est la même lame qui est utilisée pour raser les autres. Lui y compris. Il à même cité le nom de certains de ses bourreaux. Il s’agit entre autres de Boureima Keré, aide de camp de Blaise Compaoré à l’époque, le lieutenant Oumar Traoré et un certain Moumouni Ouédraogo.
La séance du jour à été suspendue au moment où les témoignages de M. Sankara atteignaient sa vitesse de croisière. Le rendez-vous est pris pour demain pour la suite de son témoignage.
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mercredi 1er décembre 2021
11h.31
« Avant de démarrer pour le conseil, Thomas Sankara a reçu un appel de sa femme », témoigne Serge Théophile Balima
L’audience de ce mercredi 1er décembre 2021 a démarré avec le témoignage du Pr Serge Théophile Balima, ancien journaliste à la Radiodiffusion du Burkina Faso. Au moment des faits, il était chargé de communication à la présidence du Faso sous Thomas Sankara. Il a été ministre en charge de la Communication et ambassadeur du Burkina Faso en France sous le Front populaire. A la retraite depuis huit ans, il est actuellement consultant.
De son témoignage, on retient que le 15 octobre 1987, il est arrivé au bureau de la présidence à 15h précises. Le témoin confie avoir fait un constat. « J’ai constaté le caractère désertique ce jour-là, de la présidence. À 15h55, je reçois l’appel de Thomas Sankara. Je monte. Arrivé, je constate avec lui que la quasi-totalité de son service de sécurité était absente », relate-t-il.
Il a ensuite reçu deux appels. Le premier, selon l’ancien chargé de communication de la présidence, semble être celui de sa femme (la femme de Thomas Sankara). La voix au bout du fil disait : « Thomas, tu es où ? Sauve toi, ils vont te tuer », précise-t-il. Thomas Sankara lui aurait répondu en disant de se calmer et qu’ils allaient en parler lorsqu’il rentrerait.
Le deuxième coup de fil venait du conseil de l’Entente. Et selon le Pr Balima, ce serait Alouna Traoré. « Camarade président, nous sommes tous réunis. On n’attend plus que toi », raconte le témoin et Thomas Sankara de répondre : « J’arrive de suite ».
Poursuivant son témoignage, aussitôt qu’il a démarré, moins de deux minutes après, il entendit un coup de feu. Selon son commentaire, c’était une alerte, pour dire qu’il avait bougé, ajoute-t-il. Quatre à cinq minutes après des tirs nourris retentissent.
« Je suis resté à la présidence trois à quatre heures. Et après j’ai décidé de sortir les mains en l’air et jongler pour arriver chez moi. C’est là ma femme me demande où j’étais, que feu Arba Diallo a appelé disant qu’on avait informé tout le personnel civil de la présidence de ne pas aller au service ce jour », a relaté le Pr Serge Théophile Balima.
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13h.28
Burkina : « On attend toujours ces milliers de Thomas Sankara », ravive le témoin Serge Théophile Balima
Le tribunal militaire a enregistré dans la matinée de ce mercredi 1er décembre 2021, la déposition du 18e témoin (sur 111 personnes citées) dans le jugement du dossier Thomas Sankara et ses douze compagnons. Il s’agit du Professeur Serge Théophile Balima, enseignant-chercheur en communication à la retraite, chargé de communication à la présidence du Faso, sous Thomas Sankara.
Serge Théophile Balima est celui-là avec qui Thomas Sankara a échangé dans son bureau à la présidence avant de démarrer à 15h55 pour rejoindre le conseil de l’Entente (à quelques dizaines de mètres) où étaient déjà en place ses compagnons pour la réunion.
Pendant environ 64 minutes (1h04 minutes), l’ancien chargé de la section presse internationale au sein de la communication de la présidence du Faso a décrit ce qu’il sait du drame du 15 octobre 87, en faisant d’abord un récit des faits avant de répondre aux questions d’éclaircissement des parties.
Parlant d’ailleurs du département de la communication de la présidence du Faso, Pr Balima confie qu’il était très bien organisé par le président Thomas Sankara, avec à l’intérieur, des responsables en charge de la presse internationale et nationale.
Serge Théophile Balima était chargé du premier volet, et c’est d’ailleurs sur un sujet y relatif qu’ont porté ses derniers échanges avec Thomas Sankara.
En effet, reconstitue-t-il, Thomas Sankara l’avait donc appelé à son bureau (sis au premier étage, actuelle Primature) au sujet d’un article paru dans les colonnes d’une presse privée à Dakar (Sénégal) et intitulé "Thomas Sankara, sur le chemin de Touré ?".
Le chargé à la communication, qu’il était, avait en commentaire (certainement dans la revue de presse, ndlr) estimé que c’était un article sans objet. Telle n’était pas la mesure de son patron Thomas Sankara qui lui instruit de préparer une mission à Dakar pour protester contre la publication.
Le spécialiste en communication, Serge Théophile Balima, lui fit savoir que c’est l’analyse d’un organe privé et que cela ne saurait engager la responsabilité des autorités politiques. Mais Thomas Sankara va établir des liens pour justifier la nécessité d’une mission à Dakar sur le sujet. Instructions lui ont donc été données, mettant fin aux échanges à 15h55, heure à laquelle le président s’est précipité à sa rencontre sus-référée et d’où il ne reviendra plus.
Durant son passage à la barre, l’ancien proche collaborateur est revenu sur la personnalité morale de Thomas Sankara et les valeurs qu’il incarnait. L’on apprend par exemple que la vie ici bas n’intéressait pas Thomas Sankara, contrairement aux autres, dont Blaise Compaoré, qui aimaient la "vie normale".
"Les attributs du pouvoir n’intéressaient pas Sankara. Il avait contribué à désacraliser le pouvoir. Il ne voulait pas être un président comme tous les autres présidents africains. (...). Thomas Sankara ne s’intéressait pas à la vie ici bas", décrit Pr Balima, qui confie avoir, lui-même, échappé à une sanction parce qu’ayant été accusé de séduire la femme d’autrui.
Serge Théophile Balima retient également que son ancien patron ne badinait pas avec les heures de travail. "Si vous arrivez trois minutes après l’heure, vous êtes sanctionné. Il ne tolérait pas les retards au service", se remémore-t-il en substance.
Le témoin retient donc que Thomas Sankara était l’incarnation des vertus, de la conviction révolutionnaire, etc . Il en veut pour illustration qu’il aimait clamer : "Tuez-moi, il en naîtront des milliers de Sankara".
Seulement, constate le témoin, "on attend toujours ces milliers de Sankara".
O.L.
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14h.13
Burkina : Thomas Sankara devait-il mourir à Tenkodogo ?
Dans sa déposition (mercredi 1er décembre 2021), l’ancien chargé de communication de la présidence du Faso, Serge Théophile Balima, a fait quelques confidences au sujet de son ancien patron, Thomas Sankara.
Le témoin Balima apprend par exemple que le 3 octobre 1987, le roi de Tenkodogo l’a reçu à son Palais.
Au cours de ladite rencontre, le roi se serait rassuré que c’est bien Thomas Sankara qui était au pupitre (référence faite au discours du 2 octobre 1987 à Tenkodogo, à la faveur de la célébration du 4è anniversaire du discours d’orientation politique, ndlr).
"Je lui ai dit oui. Il m’a dit que ses voyants ont dit qu’il (Thomas Sankara) n’avait pas son âme dans lui", dévoile Serge Théophile Balima.
Le témoin indique que le roi lui a donc suggéré de nombreux sacrifices.
Selon les explications de Serge Théophile Balima, rapportant les échanges avec le roi, Thomas Sankara devait être tué dans la province (ressort territorial du roi de Tenkodogo, ndlr)
"Il (le roi) dit que ne voulant pas que le sang se verse sur son territoire, il a fait des sacrifices", confie Pr Balima.
O.L
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16hh.07
« J’ai pris pour argent comptant ce que feu Salif Diallo m’a dit », Gabriel Tamini
Gabriel Tamini était journaliste à la radio nationale, membre du l’Union communiste burkinabè (UCB) qui était elle aussi membre du Conseil national de la révolution (CNR), au moment des faits. Il était à la barre en tant que témoin pour livrer sa version du drame du 15 octobre 1987, ce mercredi 1er décembre 2021.
"Le 15 octobre 1987, j’étais à mon domicile quand les tirs ont commencé. Je tergiversais entre fuir pour survivre ou rester et prendre le risque d’être pris et tué. Quelques instants après, pendant que j’étais devant ma porte en train de chercher une solution, j’ai vu un véhicule qui venait en trombe et garer devant ma porte. C’était feu Salif Diallo qui était avec un chauffeur", narre-t-il.
Selon lui, c’était une opportunité de prendre la poudre d’escampette avec l’aide de Salif Diallo, qui, précise-t-il, était un ami. Installé à bord du véhicule, sans savoir où on le conduisait, il demande à Salif Diallo ce qui s’est passé ? Ce dernier lui répondit qu’il y a eu des tirs au conseil de l’Entente et que Thomas Sankara est mort.
Feu Salif Diallo le conduisit, poursuit-il, directement chez Blaise Compaoré. Son domicile ressemblait à un camp militaire à leur arrivée, dit-il. Tous les trois chefs de révolution y étaient. (Blaise Compaoré, Henri Zongo et Boukari Jean Baptiste Lingani), ainsi que plusieurs autres militaires.
Après une brève escale chez Blaise Compaoré, ils prirent la direction de la radio nationale où Gabriel Tamini devait aider pour les déclarations parcequ’il connaissait la maison. Il serait resté à la radio jusqu’au lendemain.
J’ai été formellement du Front populaire que plus tard
La parquet militaire est revenu sur ses rapports avec le père de la révolution d’août 1983. Ces rapports n’étaient apparemment pas au beau fixe, selon le procureur militaire. Le témoin ne reconnaît pas avoir eu des embrouilles avec Thomas Sankara en dehors du 4 juillet 1987, confie-t-il, où il (Thomas Sankara) aurait refusé de le saluer après une réunion. Réunion au cours de laquelle, des contradictions sur plusieurs points, auraient été évoquées par son organisation (UCB).
A la question de savoir qui aurait rédigé la déclaration du 15 octobre 1987, le témoin déclare qu’il n’en savait rien. Des témoins ont affirmé l’avoir aperçu à la radio, "kalach" en main. Ça aussi, il le nie. "Votre petit Sankara là, il est mort couché là-bas comme un chien". Ces propos seraient de Gabriel Tamini, indique le procureur militaire en se référant à un témoignage inclus dans le dossier. "Non, je n’ai jamais dit cela", réplique le témoin. "C’est invraisemblable", ajoute-t-il, avant de regretter avoir été le porte-voix du message véhiculé le 15 octobre à la radio nationale. "J’ai pris pour argent comptant ce que Salif Diallo m’a dit. J’ai été formellement membre du Front populaire que bien plus tard et au titre toujours de mon organisation qui est l’UCB", se dédouane-t-il.
Me Ambroise Farama de la partie civile, fait constater que c’est dommage que Gabriel Tamini soit retenu pour être témoin à la barre.
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21h.30
Gabriel Tamini échappe à une ‘’arrestation immédiate’’
Procès Sankara et compagnons : Gabriel Tamini échappe à une ‘’arrestation immédiate’’
Libre, totalement libre, Gabriel Tamini bénéficie, depuis avril 2021, d’un non-lieu sur l’ensemble des charges contre lui dans le cadre de ce dossier Sankara et compagnons. Ancien conseiller aux affaires sociales de l’ex-président Blaise Compaoré, M. Tamini avait été inculpé dans l’affaire Thomas Sankara, pour ‘’attentat’’ et ‘’complicité d’assassinat’’ et placé sous mandat de dépôt en 2015.
C’est en qualité donc de témoin qu’il comparaît devant le tribunal militaire, ce mercredi 1er décembre 2021 pour sa déposition. Un passage qui n’a visiblement pas rencontré l’assentiment de la partie civile, qui a, partant de cette perception, demandé au tribunal de procéder à l’ "arrestation immédiatement" du témoin "pour faux témoignage".
Une requête soulevée sur le fondement légal de l’article 120 du code militaire, qui dispose que : " au cours des débats, lorsque la déclaration d’un témoin parait fausse, le Président peut, sur réquisition du commissaire du Gouvernement ou d’office faire procéder à son arrestation sur le champ. Le greffier en dresse procès-verbal adressé au Procureur du Faso du ressort du tribunal militaire".
Pour la partie civile, la déclaration paraît fausse, lorsque, contrairement aux autres témoignages et procès-verbaux, le témoin dit qu’il a rejoint Blaise Compaoré à son domicile et que c’est de là qu’ils se sont, avec d’autres militaires, rendus à la radio (pour la proclamation du coup d’Etat). La partie civile relève que tous ont dit que c’est au Conseil, où il est arrivé peu après les évènements, que Blaise Compaoré a reçu tout le monde, un à un. « Tous les éléments montrent que peu après les évènements, Blaise Compaoré s’est rendu au Conseil et c’est là-bas que se sont déroulées les tractations », charge Me Ambroise Farama.
Pour Me Guy Hervé Kam, le témoin ayant prêté serment de dire la vérité, le tribunal doit tirer toutes les conséquences de son faux témoignage et procéder ainsi à son arrestation immédiate. Pour la partie civile, la déclaration (fausse) de Gabriel Tamini porte un coup à la crédibilité même de la justice.
La partie civile bénéficie du soutien de l’agent judiciaire de l’Etat.
Mais, le Parquet militaire ne suivra pas ces deux demanderesses. L’autorité de poursuite s’est opposée aux motifs que ce que le témoin Gabriel Tamini a dit n’est pas nouveau ; il l’a déjà dit lors de sa mise en examen devant la Chambre d’accusation et c’est partant de tous ces éléments qu’il a été blanchi.
Pour le Parquet militaire, c’est une aberration de passer de statut de mis en examen à celui de témoin et passer de témoin à mis en examen. Le Parquet rappelle à la requérante que ce n’est pas parce que le témoin ne dit pas ce qu’elle veut entendre que son témoignage est faux.
Le président du tribunal, ayant finalement constaté qu’il y a "divorce" entre les deux parties (le Parquet et la partie civile), suspend à 15h49 pour délibérer sur cette requête. Le tribunal ressort à 16h09 pour le verdict : Gabriel Tamini ne sera pas arrêté, annonce le président. Par voie de conséquence, il reste témoin, soumis aux mêmes exigences de présence au tribunal pour d’éventuels besoins de confrontations.
O.L.
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23h/00
Me Hervé Kam promet de dénoncer les faux témoignages
"À l’évidence, les témoignages de ce témoin paraissent faux. Nous (la partie civile) avons réagi de la sorte parce que nous avons constaté que depuis le début de cette audience, plusieurs témoins sont venus à la barre, prêtent serment et le violent allègrement", explique Me Hervé Kam, après le refus par le tribunal, d’inculper le témoin Gabriel Tamini.
À partir de ce moment, poursuit-il, cela doit s’arrêter. Et d’ajouter qu’ils (avocats de la partie civile) feront la même demande, lorsqu’ils constateront que des témoignages parraitront faux. "Le président du tribunal continuera de refuser mais nous, notre attachement à la justice nous conduira à toujours faire cette demande", conclut-il.
De l’analyse de la députée Germaine Potroipa, il n’y a pas l’ombre d’un doute que le témoin, Gabriel Tamini, ne dit pas la vérité car dit-elle, il y a "trop" de contradictions dans la déposition du témoin Gabriel Tamini.
"Comment peut-il (Gabriel Tamini) expliquer que lui, en tant que journaliste, qu’on a suspendu quelques jours avant le coup d’État, soit le même qu’on court chercher pour une déclaration ? Comment feu Salif Diallo connaissait-il chez lui ? Pourquoi il ne s’est pas sauvé quand il a vu le véhicule qui venait chez lui en trombe ? parce-que rien ne dit que c’était Salif Diallo, à plus forte raison que le véhicule venait pour le chercher ?", s’interroge la députée de l’Union pour la renaissance- Mouvement patriotique sankariste (UNIR-MPS).
L’audience est suspendue et reprend demain jeudi 2 décembre 2021, à la même heure.
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23h.06
Coup d’État du 15 octobre 1987 : Il y avait deux commandos, selon le témoin Michel Toé
La journée d’audience de ce mercredi 1er décembre 2021 a enregistré la déposition de Michel Toé, petit frère de Fidèle Toé, ministre de la fonction publique sous le CNR..
Avant de retracer ce qu’il sait des évènements, le témoin a tenu à relever un fait en lien avec sa citation à témoin. En effet, explique-t-il, alors qu’il venait de rentrer de la Brigade de gendarmerie de Baskuy où il a pris sa citation, le 30 août 2021, il reçoit le coup de fil d’un certain Abel Palenfo, souhaitant le voir. Il lui fit savoir qu’il venait de rentrer et qu’il ne souhaitait plus ressortir. Il lui propose, soit de venir chez lui soit de ramener le rendez-vous au lendemain. La deuxième option est retenue, et l’avenue Kwamé N’krumah est le lieu donné par son interlocuteur pour se rencontrer, à 9h, ce 31 août 2021. Le témoin affirme qu’il n’avait fait de lien avec sa citation, qu’à quelques pas du lieu de rendez-vous où il trouve effectivement Abel Palenfo.
Après les salamalecs, l’interlocuteur entre dans le vif du sujet, en lui apprenant que Jean-Pierre Palm (accusé, ancien patron de la gendarmerie) n’est pas content de lui pour ce qu’il a dit devant le juge d’instruction. Le témoin confie avoir marqué son étonnement qu’à peine entré en possession de sa citation, l’on en soit ainsi informé. " C’est là qu’il m’a dit : qu’est-ce que tu crois, il (Jean-Pierre Palm) a toujours ses éléments dans le circuit là !", a révélé le témoin Michel Toé, rendant grâce d’être là ce jour pour sa déposition.
Abordant sa déposition à proprement parler, le témoin, 52 ans, a confié au tribunal qu’il n’a pas vécu les évènements du 15 octobre 87. Son témoignage concerne deux confidences que lui a faites Jean-Pierre Palm.
Par la première, il informe que Jean-Pierre Palm lui a dit un jour que leur coup a échoué, car ils n’ont pas eu Fidèle Toé (le frère du témoin), qu’ils devaient amener à confesser qu’il y avait un coup à 20 h (ce jeudi 15 octobre 87).
La deuxième confidence est relative à l’exécution du coup d’État. « Il m’a dit qu’il y avait deux commandos ; un commando dirigé par Hyacinthe Kafando et un deuxième commando dirigé par lui-même et que c’est son commando qui devait venir en soutien, si le premier échouait », rapporte Michel Toé.
Une déclaration qui a impliqué une confrontation entre l’accusé Jean-Pierre Palm et le témoin. "C’est faux", rejette l’accusé, qui dit cependant connaître le nommé Abel Palenfo. "Je n’ai pas envoyé Abel", précise-t-il sur l’appel sus-évoqué par le témoin.
Selon l’ancien commandant de la gendarmerie, Abel Palenfo a dû voir la déposition de Michel Toé dans la presse et a pris l’initiative de le contacter.
Le Parquet militaire fit savoir à l’accusé que les propos de Michel Toé concordent avec ceux livrés la veille par Fidèle Toé. Sur cette observation, Jean-Pierre Palm déclare que "les Toé-là" lui en veulent parce qu’ils pensent que c’est lui qui a mis aux arrêts un de leur parent, oncle.
Sur ce choc de propos, la partie civile a demandé au tribunal à ce qu’Abel Palenfo comparaisse pour donner sa version des faits. Au besoin, les réseaux de téléphonie-mobile pourraient être sollicités pour aider à trancher. Le tribunal a accédé à la requête. Abel Palenfo sera donc entendu sur cet appel préalablement soulevé par Michel Toé.
O.L.
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