Jeudi 28 octobre 2021
Yamba Elysée Ilboudo n’est pas le même que j’ai connu..., je l’évitais même à la MACA", se décharge Nabonsseouindé Ouédraogo
Les lignes bougent devant le tribunal militaire, délocalisé à Ouaga 2000 dans le cadre du jugement du dossier Thomas Sankara et ses douze compagnons, tombés en cet après-midi de jeudi 15 octobre 1987. De la reprise, lundi 25 octobre à cet après-midi de jeudi, 28 octobre 2021, c’est le troisième accusé qui est à la barre du tribunal.
Il s’agit de Nabonsseouindé Ouédraogo. Il succède en ce lieu à Idrissa Sawadogo et Yamba Elysée Ilboudo. Nabonsseouindé Ouédraogo est accusé de complicité d’attentat à la sureté de l’Etat et d’assassinat. Il était de la sécurité rapprochée de Blaise Compaoré.
A la lecture des charges par le tribunal, l’accusé dit ne pas s’y reconnaître. En clair, il ne reconnaît pas les faits qui lui sont reprochés.
Nabonsseouindé Ouédraogo dit être en cet après-midi du 15 octobre 1987, au pied-à-terre de Blaise Compaoré, sis au Conseil de l’Entente. Ce jour-là, il était en tenue de sport, précise-t-il (sous la Révolution, les jeudis soirs étant réservés au sport de masses, dit-on).
Il se souvient qu’entre 15h30 et 16h, Hyacinthe Kafando, dont le pied-à-terre se trouve au même lieu que celui de Blaise Compaoré, est passé dans les locaux, où il prenait la garde avec deux autres éléments.
Hyacinthe Kafando est ressorti du bâtiment et a embarqué avec des éléments qui l’attendaient à la porte. C’est peu après leur départ que les coups de feu ont commencé à retentir, retrace Nabonsseouindé Ouédraogo. Face à l’intensité et à la généralisation des tirs, ils décident de quitter leur poste de garde pour se mettre à l’abri (juste à côté de leur lieu de garde). Ils passent toute la nuit dans cette cachette, dit-il, précisant que des véhicules faisaient des entrées et sorties du Conseil.
Ne sachant pas ce qui se passait et de peur de se faire cueillir par d’éventuels ennemis (il précise que des tirs se sont faits entendre jusqu’à tard). C’est le lendemain, 16 octobre 1987, qu’ils vont ressortir pour rejoindre le domicile de Blaise Compaoré. Il explique qu’en tant qu’élément de la sécurité de Blaise Compaoré, l’autre lieu de ralliement (après le Conseil d’entente qui serait quasiment désert après le drame), c’est le domicile de Blaise Compaoré. Ils vont y trouver Hyacinthe Kafando.
« Personnellement, les événements m’ont surpris. Je n’étais au courant de rien », déclare-t-il devant le tribunal, parlant du coup d’État.
Pourtant, l’accusé Yamba Élysée Ilboudo a déclaré à la barre que Nabonsseouindé Ouédraogo faisait partie des trois militaires (dont Hyacinthe Kafando) qui ont embarqué avec lui au domicile de Blaise Compaoré (sis derrière l’ancienne Assemblée nationale) pour aller au Conseil de l’Entente.
Une contradiction que lui présente un avocat de la partie civile. "C’est faux, parce que j’étais de garde au Conseil, au pied-à-terre de Blaise Compaoré. Je lui (Yamba Elysée Ilboudo) ai même dit que ce qu’il dit est grave. Ce n’est plus la même personne que j’ai connue. Je l’évitais même à la MACA (maison d’arrêt et de correction des Armées), parce que je l’ai devancé là-bas. Si ce n’est pas lui qui venait envers moi, je l’évitais", a balayé l’accusé.
Sur certains extraits des procès-verbaux d’auditions devant le juge d’instruction, l’accusé dit ne pas se reconnaître, relevant souvent son bas niveau d’instruction. Aussi semble-t-il déplorer que le temps entre deux auditions soit long, si fait qu’il est difficile pour lui, illettré, de tenir des termes exacts.
"Il y a longtemps. Quand il nous interroge aujourd’hui, ça dure avant qu’ils nous rappellent. Eux (juges, ndlr) ont des papiers, ils regardent là-bas et nous interrogent. Alors que nous, c’est la tête, on n’a pas fait l’école, c’est difficile. Moi je suis en prison, il y a la charge de la famille qui est-là, tout ça, c’est difficile", oppose-t-il à l’avocat sur certains extraits des procès-verbaux qu’ils lui lisaient.
Toujours sur certains points relevés comme étant en contradiction avec ceux tenus par d’autres accusés et/ou témoins, Nabonsseouindé Ouédraogo dit attendre l’étape des confrontations pour donner sa version des faits sur ces volets précis.
L’audience se poursuit le mardi, 2 novembre 2021 à partir de 9 h, toujours avec Nabonsseouindé Ouédraogo.
O.L.
Lefaso.net