Malik son neveu m'a appris la cruelle nouvelle. Madame Mennouba Arbaoui est décédée le 11 mars à Constantine. Nous avions eu l’honneur et le plaisir de faire sa connaissance ainsi que celle de son mari, M. Mohammed Tahar Arbaoui lors du premier voyage de France-El Djazaïr à Constantine en 2007. Depuis nous correspondions régulièrement et j’avais été reçu à leur domicile pour un chaleureux goûter en novembre 2018. J’avais découvert une personne d’une vive intelligence alliée à une grande modestie, toute de finesse et de discrétion.
Mennouba Arbaoui née en 1931 à Annaba, habita Sétif où elle vécut à l'âge de 13 ans la terrible répression coloniale qui après le 8 mai 1945 fit quelque 45 000 morts dans l’ensemble de la région de Sétif, Guelma, Kherrata. Elle en fut marquée à vie, comme le poète Kateb Yacine qui lui aussi connut cette tragédie et écrivit ces vers,
« Du sang ! J’en ai partout !
Coagulé dans mes souvenirs,
Ruisselant dans mes rêves… »
Après ses études à l’Ecole normale de Constantine, son premier poste d’institutrice sera précisément Sétif. Engagée dans les combats pour l’Indépendance de l’Algérie ainsi que son mari Mohammed Tahar Arbaoui, militant du FLN qui fut emprisonné à Batna, puis interné successivement aux camps de Bordj Bou Arreridj, Djorf, Bossuet et enfin Lodi d’où il sera libéré. Tahar Arbaoui et son épouse Mennouba seront assignés à résidence en France, à Saint-Clair-de-Halouze dans le département de l’Orne où tous les deux enseigneront et où ils ont laissés de très bons souvenirs parmi les habitants.
L’Indépendance acquise en juillet 1962, ils retrouvèrent l'Algérie et participèrent à la rentrée scolaire de 1962 qui se déroula dans des conditions héroïques en raison de départ des enseignants d’origine européenne chassés d’Algérie par l’OAS. Les qualités humaines et d’enseignante de Mme Arbaoui la conduiront à être nommée Principal du Collège (école intermédiaire) Sidi Mabrouk de Constantine et, avec son mari devenu Inspecteur de l’Enseignement (1), ils contribueront à la naissance et à l’essor de l’enseignement public pour tous/toutes qui constituera une des réussites de la Présidence de Houari Boumediene.
La disparition de Mme Arbaoui plonge toute une famille dans la douleur. Que M. Arbaoui dont l’amitié m’honore, ses enfants, Fadila, Jahida, Selma et Cherif, leurs parents et alliés sachent que je partage leur chagrin. Puissent l’affection et l’estime qui les entourent leur apporter un peu de réconfort.
Bernard DESCHAMPS
1 - M. Mohammed Tahar Arbaoui fut Président (Maire) de l'APC de Constantine de 1975 à 1984, puis Vice-Président de l'Assemblée Populaire de la Wilaya de 1985 à 1989.
(Les informations sur le parcours de Mme Arbaoui m’ont été fournies par Jean-Paul Guignard qui fut enseignant-coopérant en Algérie sous sa direction. La photo a été prise en 2007 par Mireille Berthier)