Le Soir DZ
Publié par Abla Chérif
le 10.02.2021
Une réunion extraordinaire du Conseil de la Ligue arabe s’est penchée ce lundi sur le dossier de la Palestine. Alger y était présente, une voix discordante dans un environnement dominé par des positions ambiguës.
L’Algérie était au Caire représentée par son ministre des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, qui a tenu à annoncer, le jour même sur son compte Tweeter, sa participation à une rencontre qui, il faut le dire, survient à un moment très particulier que traverse le monde arabe. Plusieurs Etats puissants et qui tiennent cette organisation (la Ligue arabe) entre les mains ont, en effet, officiellement décrété une normalisation de leurs relations avec Israël, mais en tentant, toutefois, de garder un pied dans l’autre étrier, puisqu’ils ont fait savoir à la même occasion qu’il ne s’agissait pas pour eux de mettre fin au soutien à la cause palestinienne. Le coup de poignard est parti dans une conjoncture marquée par un grand jeu d’intérêts, mené par l’ancien Président américain, Donald Trump. Obnubilé par l’idée d’asseoir son pouvoir et de s’attirer les sympathies des électeurs pro-israéliens qui peuplent en force l’Amérique, il a mis en place un plan de rapprochement arabo-israélien, en comptant naturellement sur l’appui des plus puissantes monarchies du Golfe. Les Emirats arabes unis, Bahreïn, puis le Soudan ont prôné officiellement leur reconnaissance d’Israël au mois d’août dernier, suivis, tout récemment, par le Maroc, s’attirant de lourdes critiques de l’Autorité palestinienne, mais la démarche de Trump et de Jared Kouchner (son beau-fils et puissant conseiller) coince et commence à patiner avec la percée de Joe Biden. Son arrivée à la Maison-Blanche soulage l’Autorité palestinienne. Une nouvelle page s’ouvre. Les Palestiniens espèrent pouvoir œuvrer à la remise en marche d’un processus saboté. La réunion d’urgence du Conseil de la Ligue arabe, à un niveau ministériel, intervient dans ce contexte à l’appel de l’Egypte et de la Jordanie qui se disent inquiètes des évènements qui se précipitent dans la région arabe. La cause palestinienne est au menu principal. Alger, l’une des rares voix encore constantes sur le dossier au sein de la Ligue arabe, y prend part. Dans le pays, des voix s’élèvent depuis des années chez les partis politiques et l’opinion pour amener l’Algérie à quitter une organisation qui a montré ses limites et où se multiplient les trahisons. Les gouvernements successifs n’ont pas la même vision. Une rupture brutale n’est pas envisagée par des décideurs qui ne semblent pas emballés par l’idée de la politique de la chaise vide. Décision est prise de tenter de lutter de l’intérieur de cette organisation. L’Algérie y parviendra-t-elle, cependant ?
Ce point de vue est l’essence même du discours qui a été développé ce lundi par le MAE algérien au Caire. Un discours plein de non-dits, trahissant à peine la désapprobation algérienne des dérives dans le monde arabe. On a vu que Boukadoum a insisté sur la nécessité de «mettre d’abord de l’ordre dans la maison, d’unifier les visions et de mettre en place un mécanisme collectif efficace», pour parvenir aux objectifs fixés. Il a, bien sûr, également insisté sur la position constante de l’Algérie à l’égard de la lutte que mènent les Palestiniens pour recouvrer leurs droits, et des dangers qui guettent le monde arabe, nécessairement appelé à s’organiser autrement pour riposter aux menaces en «adoptant des positions sincères».
Sur la question, les recommandations adoptées à l’issue de cette réunion comportent un appel des ministres arabes à la prise de mesures concrètes, à même de lancer des pourparlers crédibles pouvant mener à une solution définitive, mettant un terme à l'occupation israélienne dans les territoires palestiniens occupés. A travers le monde, les observateurs étaient nombreux hier à commenter cette réunion, la jugeant plutôt «formelle» et sans effet sur la réalité, compte tenu des processus dans lesquels se sont engagés les principaux Etats représentés dans cette organisation. Dans son journal de la mi-journée, la Chaîne 3 a fait, elle, intervenir un spécialiste du Moyen-Orient qui a qualifié l’événement de «non-sens», dans la mesure où seule l’Algérie pouvait être considérée comme étant un Etat reflétant de réelles positions de soutien à l’égard de la Palestine.