Après un début d’ouverture, l’Algérie se reconfine… Les autorités ont fait refermer de nombreux commerces dans plusieurs régions, y compris à Alger. Selon l’Institut national de santé publique (INSP), l’Algérie a enregistré « une augmentation de 27 % des cas confirmés » entre le 24 avril, date du début du ramadan, et le 30 avril. »(au total, 5 891 cas et 507 décès).
Selon les médias algériens, cette démarche de fermeture concerne également la vie politique. C’est ainsi qu’ils interprêtent la loi de finances complémentaire pour 2020 et les propositions de révision de la Constitution rendues publiques par le Président Tebboune.
La LFC20 confirme l’assouplissement – étape vers sa suppression – de la règle 51/49 qui imposait la majorité de 51% en faveur de l’Algérie dans les montages financiers avec des capitaux étrangers. Cette règle qui avait été édictée en 2009 par le Président Bouteflika était très critiquée par les investisseurs étrangers potentiels et notamment en France par le MEDEF.
L’avant-projet de révision de la Constitution propose selon APS (Agence Presse Service) la : « Constitutionnalisation de la participation de l’Algérie à des opérations de maintien de la paix sous les auspices des Nations Unies." Si cette proposition est retenue, elle constituera une remise en cause fondamentale de la traditionnelle politique de l’Algérie de non intervention militaire hors de ses frontières. S'agissant d'une question de politique extérieure, ne concernant donc pas uniquement la politique intérieure de l'Algérie qui elle relève de sa seule souveraineté, je me sens autorisé à émettre une opinion. Cela pourrait se concevoir si les décisions de l'ONU étaient prises démocratiquement en Assemblées Générales, mais le plus souvent elles sont prises par le Conseil de Sécurité qui n'est pas vraiment représentatif de l'ensemble des Nations et dont les décisions parfois ambiguës prêtent à des interprétations diverses qui peuvent être dangereuses. Il me semble donc que l'Algérie avait raison de limiter les interventions de l'ANP à l'intérieur de ses frontières. Remettre en cause cette orientation porterait atteinte à son aura internationale d'acteur de la Paix qui lui permettait d'être médiatrice dans les conflits en Afrique, au Proche et au Moyen-Orient.
De nombreux observateurs s’attendaient à ce que la future Constitution introduise quelques avancées démocratiques or, plusieurs constitutionnalistes algériens notent au contraire une extension des pouvoirs du Président de la République. (Algérie Eco, 11 mai 2020).
Quelles vont être les réactions de la population ? Le hirak qui s’était prononcé contre l’élection du 12 décembre et qui considère illégitime le nouveau Président, avait interrompu ses démonstrations de masse du mardi et du vendredi en raison du coronavirus. Ces manifestations reprendront-elles ? Un rassemblement s'est déroulé le 10 mai 2020, malgré la pandémie de Covid-19 près de Tizi-Ouzou en Kabylie pour dénoncer la convocation par la police de jeunes activistes du mouvement de contestation populaire. Il a réuni, selon certains commentateurs, quelques dizaines de jeunes. Quelques centaines pour d’autres.
Bernard DESCHAMPS
12 mai 2020