Ne nous habituons pas !
Le capitalisme mondialisé pourrissant, comme une bête sauvage se bat à mort pour survivre. Un nouveau degré est franchi avec l'interventionnisme US au Venezuela. Ce qui se passe en France à une autre échelle est aussi d'une extrême gravité: selon Amnesty International on dénombre 46 blessés graves par la police parmi les Gilets Jaunes depuis le 17 novembre. Fait nouveau, la loi dite "anticasseur" votée à l'Assemblée Nationale qui donne des pouvoirs discrétionnaires aux Préfets est une atteinte intolérable au droit de manifester.
Ne nous habituons pas, luttons pour mettre en échec ces politiques. C'est possible!
N’abandonnons pas le drapeau tricolore…
En lisant l’article de Florian Gulli et Jean Quetier « Internationalisme et politique nationale » dans le dernier numéro de Cause commune (1), je repensais à celles/ceux de mes ami(e)s qui s’inquiètent de la présence du drapeau français dans les manifestations des Gilets Jaunes, y voyant la preuve de la présence de l’extrême-droite. Certes, celle-ci est présente et la lutte n’est pas gagnée pour la suprématie des idées progressistes, bien que celles-ci aient progressé depuis le 17 novembre, sur les idées nauséabondes des Le Pen, Dupont-Aignan et autres Identitaires.
Mais cette réaction nous interroge à la fois sur la confiscation des couleurs nationales par l’extrême-droite et sur la place des nations et de leur rôle à l’heure de la mondialisation capitaliste.
Opportunément, l’article de Cause commune rappelle les réflexions de Lénine et d’Antonio Gramsci sur cette seconde problématique. L’un et l’autre se prononçaient avec vigueur contre l’abandon du terrain national et des conditions nationales du combat du prolétariat. Nos deux auteurs écrivent : « L’affirmation du caractère central de la lutte internationaliste doit-elle conduire à négliger l’échelon national ? Gramsci est convaincu du contraire ; si la classe ouvrière veut entraîner avec elle de larges couches de la population, elle doit aussi se constituer en force nationale. Plaider de manière abstraite en faveur de la révolution mondiale, c’est se condamner à l’impuissance. » Et ils notent que Lénine dans des conditions différentes se prononça dès 1899 dans le même sens en refusant de copier le « modèle » révolutionnaire occidental. Ajoutons qu’en France ce fut un des mérites du jeune Parti communiste, de réconcilier le drapeau rouge et le drapeau tricolore. Dans son rapport présenté au VIIIe Congrès national de Villeurbanne du PCF en janvier 1936, Maurice Thorez affirmait : « Contre les parasites, contre les traîtres, nous voulons l’union de la nation française. Nous avons repris la Marseillaise et le drapeau tricolore de Valmy aux descendants et aux continuateurs des émigrés de Coblence ».(2)
Certes, le drapeau tricolore a été compromis dans l’aventure criminelle des guerres coloniales et bien qu’il soit aujourd’hui revendiqué par l’extrême-droite, il n’en demeure pas moins le symbole de la nation française au nom de laquelle sont morts des Résistants à l’occupant nazi. Ne le laissons pas aux mains des continuateurs des collabos d’hier.
Oui, mais me direz-vous, le monde a changé. A l’heure de la finance mondialisée, les économies sont de plus en plus interdépendantes. Les luttes pour vivre mieux, pour la démocratie, pour la paix doivent être désormais plus que jamais coordonnées internationalement. C’est vrai et c’est ce que s’efforce de faire le PCF. Ainsi l’Europe dont nous combattons l’orientation politique est pour nous un des échelons pertinents d’action et de luttes… Mais pour autant cela ne gomme pas les caractères propres des nations hérités de l’histoire et qui ont forgé des sensibilités, des cultures à la base d’approches différenciées des problèmes communs à toutes les victimes du capitalisme mondialisé.
Donc n’abandonnons pas les luttes à l’échelon national mais situons les dans leur perspective internationale.
Bernard DESCHAMPS
31 janvier 2019
1-Cause commune, revue d’action politique du PCF, c/o ABOSIRIS, BP 53, 91540 MENNECY.
2-Maurice Thorez, Fils du peuple, Editions Sociales, 1960, page 109.