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8 décembre 2017 5 08 /12 /décembre /2017 07:22

MACRON EN ALGERIE

   Le président de la République française, contrairement à François Hollande en 2015, n’aura donc passé qu’une petite journée à Alger. Ce simple fait en dit long quant à ses proclamations d’amitié pour l’Algérie. Par contre, il s’est longuement attardé dans la célèbre avenue Ben M’hidi, serrant des mains, engageant la conversation avec les passants et rabrouant un jeune algérois qui lui demandait de condamner le colonialisme. Son leitmotiv : il faut regarder vers l’avenir, prétexte commode pour éviter de parler du passé colonial de la France. Redisons-le, sans nous lasser : L’Algérie en a tellement souffert, qu’il n’y aura pas d’amitié durable et sans arrières pensées si la France ne reconnaît pas sa responsabilité. Sa promesse de restituer les crânes des résistants de 1849 n’exonère pas Macron de cette obligation. Les déclarations de François Hollande en 2015 avaient constitué une importante avancée. Celles d’Emmanuel Macron sont en retrait , ce qui n’augure rien de bon pour l’avenir.

     Il a été clair sur un point : L’Algérie doit s'ouvrir – selon lui –   davantage  aux investissements étrangers. On peut supposer qu’il sous-entend par là que l’Algérie doit abandonner la règle du 51/49 % qui impose une majorité du capital algérien dans les montages financiers avec des groupes étrangers. Le président « des riches » - je dirai plutôt celui des banques – parle d’or. Décidément, comme à Ouagadougou, Macron  se croit investi de la mission de faire la leçon au monde entier. La morgue de ce jeune prétentieux est insupportable.

   A l’heure où j’écris ces lignes, on ne connait pas encore dans le détail les propos qu’il a tenus au sujet de la Libye , du Mali et du Sahel, lors de ses entretiens avec le Président Bouteflika et les autres responsables de l’Etat, mais on peut supposer- comme l’écrit la revue Jeune Afrique - qu’il a confirmé son choix des interventions armées à l'opposé des efforts de paix de l’Algérie, comme il l’avait fait à Gao peu de temps après son élection  (mon article « Macron et l’Algérie » du 8 septembre 2017 sur ce blog).

    Je suis pessimiste en ce qui concerne  l'avenir des relations entre la France et  l’Algérie sous la présidence d’Emmanuel Macron.

DEUX LIVRES QUI NOUS PARLENT DE L’AFRIQUE

   Je remercie Lysianne de m’avoir signalé ce roman et cette thèse de doctorat que je ne connaissais pas. J’ai lu avec intérêt ces deux ouvrages qui se complètent en ce que l’un permet une meilleure connaissance factuelle de la politique coloniale, tandis que grâce au roman  et à son approche sensible, nous sentons battre le cœur des Africains.

   Naître ou ne pas naître noir, Victor Khatémo, éditions Myriapode 2011. Ce jeune auteur – il a 47 ans - nous raconte l’histoire de sa famille dans la région des Grands lacs. Victor Kathémo a déjà une belle carrière derrière lui. Il a été couronné de plusieurs prix littéraires. Né à Bukavu dans la République Démocratique du Congo (RDC), d’un père congolais et d’une mère rwandaise, son enfance et son adolescence se déroulent au Congo Kinshasa à l’époque du génocide qui fit plusieurs milliers de morts au Rwanda parmi les tutsis assassinés par des milices hutues à la suite de l’accident d’avion (provoqué ? par qui?) du président Juvénal Habyarimana en 1994. V. K. ne prend pas parti quant aux responsabilités des uns et des autres. Ce que l’on peut comprendre. Mais il ne met pas, non plus, en cause la responsabilité -  pourtant avérée - des soldats français qui étaient sur place. De même qu’il nie celle du  système colonial qui exacerba les antagonismes ethniques. Par contre, il décrit avec un luxe de détails les scènes de pédophilie auxquelles se livraient des prêtres de la mission catholique. Il partira vivre en France où son intégration sera difficile. Sa description des tracasseries racistes et des pressions qu’il y subira est éloquente.

   Son récit est écrit dans une langue riche et colorée, propre aux auteurs africains qui enchantent la langue française en lui apportant la couleur et la musicalité africaines. D’aucuns estimeront peut-être que son style mériterait d’être allégé. Je trouve pour ma part que c’est la profusion des images  qui lui confère son charme.

   Le second ouvrage,  De l’idéologie coloniale à celle du développement  (L’Harmattan, février 2010)   est issu d’une thèse de doctorat de Françoise Dufour sous la direction de mon ami M. le Professeur Paul Siblot, soutenue en 2007 à l’Université Paul Valéry de Montpellier. Je crains en la résumant de la dénaturer. Je me bornerai donc à dire qu’il s’agit d’une étude très savante et à reproduire ici quelques phrases qui me paraissent significatives : « L’objet de cet ouvrage est une analyse du discours des relations de dominance coloniale et postcoloniale que la France a entretenues avec une partie du continent africain. » (P.11). « Dans le paradigme colonial de la civilisation héritée des Lumières, la composante économique se constitue en « registre-maître ». (P.230) « La notion de développement remplace et recompose celle de civilisation. » (P.231) Cette étude confirme en l'enrichissant ce que j’écrivais le 3 décembre dernier sur ce blog ( AU FIL DES JOURS…(81) à propos des philosophes du siècle des Lumières.

Bernard DESCHAMPS

08/12/2017

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