L’Expression DZ
28/12/2017
Le moment est historique, un nouveau chapitre vient de s'ouvrir. Officiellement consacré fête nationale, Yennayer 2018 aura un goût particulier et les Algériens le fêteront dans la liesse et la joie puisque l'événement a retrouvé la place qui lui sied au sein de la société. Ce n'est que justice rendue.
Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, vient de rectifier une injustice historique. Il a annoncé, hier, lors de la réunion du Conseil des ministres, sa décision de consacrer Yennayer journée chômée et payée dès le 12 janvier 2018. Dans le même esprit et en présentant ses meilleurs voeux au peuple algérien à la veille de l'année 2018, le président Abdelaziz Bouteflika a annoncé sa décision de consacrer Yennayer journée chômée et payée dès le 12 janvier prochain, le gouvernement étant chargé de prendre les dispositions appropriées à cet effet. Cette mesure comme toutes celles déjà prises au profit de notre identité nationale dans sa triple composante islamique, arabe et amazighe, confortera l'unité et la stabilité nationales.
Cette décision saluée par les citoyens est de nature à renforcer la cohésion nationale et elle mettra le pays en phase avec sa profondeur historique millénaire. Il ne pouvait en être autrement quand on sait que tous les Algériens du nord au sud d'est en ouest célèbrent cette fête. Elle est en réalité la fête qui fait l'unanimité, elle constitue le véritable ciment de notre unité culturelle. Sa déclaration par le président de la République n'est que justice rendue pour un fait historique et culturel national. Ainsi, Yennayer 2018 aura un goût particulier et les Algériens le fêteront dans la liesse et la joie puisque l'événement a retrouvé la place qui lui sied au sein de la société. La revendication n'est pas nouvelle, mais elle est intiment attachée à la revendication de la cause amazighe. Il y a quelques jours, des écrivains et intellectuels ont lancé une pétition pour que la journée de Yennayer soit officiellement décrétée comme jour férié (donc chômé et payé). Parmi les écrivains qui ont lancé cette initiative qui intervient à la veille de cette fête du jour de l'An amazigh, on peut citer Brahim Tazaghart (auteur prolifique de romans en kabyle), l'écrivain francophone Amine Zaoui, Achour Fenni (poète), Lazhari Labtar (écrivain), Lynda Koudache et le chercheur dans le domaine du patrimoine amazigh, Salim Souhali.
Doucement, mais sûrement, l'Algérie s'est lancée dans le processus de réappropriation de son identité nationale. Les premiers frémissements identitaires remontent à la crise berbériste de 1949. Depuis, la flamme ne s'est jamais éteinte. Reprise par la génération des années 1970 pour aboutir au prime time amazigh de 1980, la grève du cartable en 1995 et la création du Haut-Commissariat à l'amazighité (HCA), le 27 mai 1995, le printemps noir, la consécration de tamazight langue nationale en 2008, et enfin elle accède à son statut de langue officielle lors de la dernière révision de la Constitution de 2016.
La seconde décision phare qui fera le bonheur des millions d'Algériens et surtout apaisera une tension pesante ces derniers jours en Kabylie est celle liée à tamazight, promue officiellement langue nationale et officielle. Le chef de l'Etat «a enjoint au gouvernement de ne ménager aucun effort pour la généralisation de l'enseignement et de l'usage de tamazight, conformément à la lettre et à l'esprit de la Constitution». Le président de la République a également «chargé le gouvernement d'accélérer la préparation du projet de loi organique portant création d'une Académie algérienne de la langue amazighe», indique un communiqué rendu public à l'issue du Conseil des ministres. Manifestations, polémiques, manipulations ont été le lot de ces dernières semaines en Kabylie.
Tout est parti à la suite du rejet par la commission juridique de l'APN, d'une proposition d'amendement au profit de la langue amazighe. Mal interprétée? Mal appréciée? Le flou a été total cédant la place à la manipulation et à la surenchère. Tour à tour le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, le ministre de la Jeunesse et des Sports El Hadi Ould Ali, la ministre de l'Education, Nouria Benghabrit, le président du Haut-Commissariat à l'amazighité, Hachemi Assad, sont montés au créneau pour rappeler que la prise en charge de tamazight n'est pas une vue de l'esprit mais une réalité qui fait doucement et sûrement son chemin. Le tamazight a franchi des étapes telles que les programmes de formation des enseignants et les outils pédagogiques de son enseignement ne constituent plus des soucis dans le processus de son apprentissage.
Le nombre d'élèves qui étudient la langue amazighe a atteint durant l'année 2017-2018, près de 350.000 élèves au niveau de 38 wilayas du pays encadrés par 2757 enseignants. L'enseignement de tamazight est passé de 11 wilayas en 2014 à 38 wilayas durant l'année scolaire 2017-2018, et a touché 343.725 élèves contre 252.155 élèves inscrits durant l'année scolaire 2014-2015. Malgré ces assurances, ces rappels et ces chiffres à l'appui, rien n'y fut, l'incompréhension persistait. De violents affrontements ont eu lieu, notamment à Bouira où les autorités ont été contraintes de fermer l'université. La situation a failli dégénérer puisque les manifestations ont fait tache d'huile. La protestation ne s'est pas limitée, à Tizi, Boumerdès, Bouira et Béjaïa. Le mouvement a suivi à Batna, Sétif et à Alger (université de Bab Ezzouar). Pour la première fois, une réelle prise de conscience générale au sujet de tamazight. L'intervention du président Bouteflika est un signal on ne peut plus clair pour cette prise en charge effective de la langue et de la culture amazighes. Le moment est historique, un autre chapitre vient de s'ouvrir...