Mes enfants vont chaque année en Finlande dans la famille d’Ann-Charlotte. Je n’y étais pas retourné depuis vingt-quatre ans. Je fais le voyage avec Annélie et Anna-Sofia (Nana). Ann-Charlotte et Frédéric, Cécilia et Charles sont déjà sur place. Adil nous rejoindra dans quelques jours.
Avec son short, ses baskets et son sac à dos, lunettes de soleil sur le nez, Nana est équipée pour les longs voyages. C’est déjà une grande voyageuse qui est allée plusieurs fois en Finlande et au Maroc.
Vendredi 14 juillet
Souvenirs de lumière mauve; de forêts à perte de vue entrecoupées de lacs grands comme des mers intérieures; de rochers surgissant des sous-bois comme des monstres endormis…Un pays mystérieux. Le pays des trolls. Et c’est un soleil éclatant qui nous accueille. La silhouette sombre des sapins qui au loin bordent les pistes, confirme que nous venons bien d’atterrir en Finlande.
Que de changements en vingt-quatre ans ! Les abords de l’aéroport d’Helsinki qui étaient alors quasi sauvages sont désormais construits : hôtels, sièges sociaux, entrepôts, magasins, d’une architecture moderne, ont envahi tout l’espace, donnant une impression de prospérité. Ce sentiment va être encore renforcé par la coquetterie des habitations qui de loin en loin jalonnent notre route jusqu’à Sideby sur la côte ouest.
2017 est l’année du centième anniversaire de l’indépendance votée par le Parlement finlandais le 6 décembre 1917 et reconnue le 4 janvier 1918 par la jeune Union Soviétique.
Après 1945, cultivant sa neutralité, la Finlande qui dut payer de lourds dommages de guerre à l’Union Soviétique, reçut en échange une aide importante pour son industrialisation. Bien que la Finlande ne fut jamais un pays communiste - c’est une économie de libre marché hautement industrialisée - elle sera largement tributaire économiquement de l’URSS. Son niveau de vie est alors un des plus élevés d’Europe. Elle va subir le contrecoup de l’implosion de l’URSS en 1989, avant de reprendre sa marche en avant en s’engageant dans les nouvelles technologies (Nokia et autres). La Finlande est membre de l’Union Européenne depuis 1995 et elle a adopté l’euro comme monnaie. Elle connut une nouvelle récession à la suite de l’effondrement de Nokia et des sanctions économiques occidentales contre la Russie. Depuis 2016, elle renoue avec la croissance avec un PIB en hausse de 0,9%. Son taux de chômage était de 8,7% en décembre 2016 contre 6,9% en Suède.
Le Président de la République de Finlande est M. Sauli Niinistö (conservateur). Il a été élu en 2012. Dirigé par le Premier ministre libéral Juha Sipilä, le gouvernement, formé à la suite des élections législatives du 19 avril 2015, est constitué et soutenu par une coalition de droite entre le Parti du centre (Kesk) et le Parti de la coalition nationale (Kok). Le parti d’extrême-droite les Vrais Finlandais (PS) qui en faisait partie en a été exclu le 12 juin dernier.
Le Parti social-démocrate de Finlande, membre de l'Internationale socialiste qui a longtemps dirigé la Finlande, représente actuellement entre 20 et 25% des votants.
L'Alliance de Gauche issue du Parti Communiste de Finlande recueille entre 6 et 10 % des suffrages et dispose depuis 2015 de douze députés au Parlement finlandais.
Le Parti des travailleurs communistes (Pour la paix et le socialisme) et le Parti communiste de Finlande n’ont pas d’élu au Parlement.
Samedi 15 juillet
Trois cent soixante kilomètres nous séparent de Sideby, berceau de la famille d’Ann-Charlotte. Nous passons par Tampere où Wladimir Illitch Lénine trouva refuge à plusieurs reprises avant la Révolution d’Octobre et dont le soulèvement communiste, après la victoire des Bolcheviks en Russie, fut écrasé dans le sang par les troupes du Général Mannerheim. Les anciennes usines en briques rouges qui étaient de véritables forteresses ouvrières ont été rénovées en leur conservant leur aspect extérieur. Elles abritent désormais l’université, des musées, des cinémas et des supermarchés.
La maison de Pipsa où nous allons passer nos vacances est située au centre de Sideby. C’est une maison traditionnelle en bois, rouge sang de bœuf avec l’encadrement blanc des fenêtres. Elle est entourée d’un espace herbu d’où s’élancent des bouleaux de haute taille. Plusieurs massifs de groseilliers nous promettent une récolte abondante mais la maturité cette année est en retard. Devant l’entrée des touffes de lupin et de sauge des prés en pleine floraison. Et tout près, l’atelier d’Henrik le frère d’Ann-Charlotte et les étables de l'ancienne ferme transformées en hangars pour accueillir les bateaux qui lui sont confiés pour réparation ou gardiennage.
Les enfants m’ont aménagé une jolie chambre sous les combles avec les poutres apparentes. Entièrement lambrissée, murs et plafond, en bois de pin dont la senteur m'enchante.
Lundi 17 juillet
Ce matin, je renoue avec une pratique de ma jeunesse. Je fauche l’herbe pour dégager les groseilliers. Les gestes pour affûter la lame de la faux me reviennent instinctivement ainsi que mouvement ample du bassin de droite à gauche pour abattre l’herbe et éviter les pierres. La qualité du fauchage dépend à la fois de la souplesse des mouvements du corps et de la qualité de la lame dont il faut souvent passer le fil à la pierre à aiguiser. Ces gestes sont restés inscrits dans la mémoire de mes muscles.
Je reçois une aide précieuse : « Papy, je viens jardiner avec toi ! » Nana aura trois ans en octobre et c’est déjà une vaillante petite bonne femme. A son âge, Annélie sa maman m’aidait à scier du bois pour la cheminée de notre maison des Cévennes. Vêtue d’une salopette et d’un débardeur à rayures, chaussée de bottes, un foulard rouge autour du cou, Nana arrive armée d’un râteau et d’un balai aussi grands qu’elle et d’un seau ; elle va pendant une bonne heure m’aider à transporter l’herbe coupée sur un chariot. Je lui apprends à se méfier des orties. Pour nous reposer, nous nous asseyons sur le tronc d’un bouleau abattu par Henrik et nous regardons dans le ciel les longs filaments des cheveux des fées qui ont chassé l’orage qui menaçait et nous inventons des histoires…de fées bien sûr ! Ma Nana…
Kilen (prononcez Schilen), à deux kilomètres de la maison de tata Pipsa est LE port de Sideby sur le golfe de Botnie. Un port modeste mais sympa. La route pour y accéder passe devant la banque ( !!!), l’église jaune en bois, avec près de l’entrée la statue du «Pauvre homme» où l’on dépose quelques pièces de monnaie. En arrivant à Kilen on est accueilli par le vieux moulin à vent et une ancre énorme qui des rochers regarde vers le large. Du ponton où sont amarrées plusieurs barques, on peut plonger et se baigner, ce que nous ne ferons pas car l’eau, cette année, est décidément trop froide. Une belle salle des fêtes a récemment été aménagée à Kilen qui avec son restaurant et ses vieilles maisons, en fait un lieu agréable de promenade.
« Dis, Papy pourquoi tu es vieux ? » Nana a des préoccupations existentielles .Je lui ai fait cela va de soi un cours de biologie. Nana Sofia a une maturité qui m’étonne pour son âge. Elle joue aux dés avec Annélie sa maman et Adil son papa. Elle sait compter jusqu’à six. Elle va quitter la crèche et faire sa rentrée à l’école maternelle en septembre. Que le temps passe vite !
Jeudi 20 juillet
Je ne connaissais pas Rauma. Je suis conquis. Cette ville qui contrairement à beaucoup d’autres a été épargnée par les incendies, a conservé ses maisons du XVIIe siècle. Ses façades colorées. Ses fenêtres aux encadrements sculptés. Ses cours intérieures ombragées et fleuries où l’on pénètre en ayant le sentiment de violer l’intimité de leurs habitants. Sur la place, un orchestre de musiciens du 3e âge (le mien) donne un concert de musique locale ancienne. Emouvant ! Ce sont des gens de mon âge. J’éprouve comme eux la nostalgie des temps anciens et les rhumatismes qui nous handicapent donnent à leur interprétation un tempo ralenti. Mais ils sont tellement sincères que l’émotion musicale est singulièrement présente.
Nana danse au milieu de la place sur les rythmes de ces vieux airs finlandais. Comédienne ! Nana adore faire le « pestacle ». A l’évidence Charles et Cécilia l’ont effleurée de leur baguette magique.
Nana aime l’eau. Elle est une habituée des plages du Grau du Roi, mais sur la plage d’Yyteri près de Pori, il faut la retenir car l’eau décidément est trop froide, alors elle court éperdument, coudes au corps, sur le sable.
Sur le chemin du retour nous faisons un détour par la presqu’île d’Olkiluoto où est en construction le réacteur nucléaire EPR (réacteur à eau pressurisée) construit par le consortium Areva- Siemens pour le compte de l’opérateur finlandais TVO. II pourrait produire de l’électricité l’an prochain.
Ce réacteur nucléaire de troisième génération, d'une puissance de 1600 mégawatts électriques, a pour objectif d’améliorer la sûreté et la rentabilité économique des centrales nucléaires par rapport à celles dotées de réacteurs de génération précédente. Il est conçu pour utiliser de l’uranium enrichi à 5 % et éventuellement du combustible nucléaire MOX fabriqué à Marcoule dans le Gard. Quatre réacteurs de type EPR sont en cours de construction : un en Finlande à Olkiluoto, un en France à Flamanville et deux autres en Chine à Taishan. Prévue pour durer 4 ans et demi, leur construction se révèle très problématique puisque les chantiers de Finlande et de Flamanville sont respectivement commencés depuis 10 et 8 ans et sont encore loin d'être achevés, tandis que leur coût a plus que triplé, augmentant de 3 à 10,5 milliards d'euros chacun et plombant les finances du groupe français AREVA. Quatorze ans après la signature du contrat, douze ans après le début des travaux, l’EPR d’Olkiluoto entre enfin en phase de test.
Il s’agit d’une batterie de tests à froid qui visent à vérifier l’étanchéité du circuit primaire, les tuyauteries qui relient la cuve du réacteur aux générateurs de vapeur. La mise sous pression sera graduelle, jusqu’à des valeurs supérieures à celles qu’exige le fonctionnement normal du réacteur. Les tests fonctionnels à chaud sont programmés cet automne si l’on en croit World Nuclear News, l’organe d’information spécialisé de la World Nuclear Association.
46,8% de l’énergie consommée par la Finlande proviennent de combustibles fossiles (charbon et gaz) ; 30,2% renouvelables (biomasse) ; 18% du nucléaire ; les importations nettes s’élevaient en 2012 à 4,6% (majoritairement en provenance de Russie).
Le parc nucléaire finlandais se compose actuellement de quatre réacteurs répartis sur deux sites. Outre l’EPR d’Olkiluoto, la Finlande envisage la construction dans le nord du pays d’un nouveau réacteur en coopération avec le Russe Rosatome.
Ce soir Nana joue avec la pâte à modeler. Je lui ai fait une table et des chaises en pâte dont j’étais très fier. Moue dubitative de Nana. Je lui ai alors réalisé tout un troupeau de moutons avec le berger, son chapeau et son bâton : «Bravo, Papy, tu as compris.» ( !!!) J’ai la fâcheuse habitude de me moucher bruyamment. Cela la met en joie et elle se moque de moi en faisant la trompette. Coquine ! A Frédéric qui lui demandait hier de ranger ses jouets, elle répondit : « Vas-y, je regarderai. » Commandante !
Vendredi 21 juillet
Kristinestad à une quarantaine de kilomètres de Sideby est une charmante petite ville avec son lycée, son service d’urgences médicales qui a remplacé l’hôpital victime des mesures d’austérité, ses deux églises, ses banques, ses supermarchés. C’est la ville centre de la région où l’on va faire les courses bien qu’une petite épicerie existe toujours à Sideby. Une ville qui a conservé de nombreuses maisons anciennes. C’est un peu une ville musée comme Rauma. La route pour s’y rendre traverse évidemment la forêt, mais également de grandes surfaces cultivées : des champs d’avoine encore verts en cette saison et surtout d’immenses champs de pommes de terre dont la floraison commence à peine. La récolte n’est pas pour demain. Je n’avais encore jamais vu de telles surfaces consacrées à la culture du tubercule qui avec le saumon, les corves (saucisses) et la bière constituent la base de l’alimentation des Finlandais. C’est aujourd’hui la grande foire annuelle de Kristinestad. Toute la ville, la moindre place, les trottoirs, les arrière-cours sont envahis par les marchands ambulants. C’est un bric à brac invraisemblable mais sympathique où l’on trouve aussi bien de vieilles dentelles que des pots de chambre, des légumes et des fruits, des objets en bois sculptés utilitaires ou décoratifs, des fauteuils, des poussettes, des vélos, beaucoup de vélos dans un pays où sa pratique est générale et cette année des fromages de toutes sortes de marques anglaises…A midi nous dégustons assis à la table commune sous un auvent une friture de petits poissons avec des frites assaisonnées d’une sauce à l’ail.
Nana adore les histoires. Je lui apporte un nouveau livre lors de chacune de mes visites. Le dernier en date est un livre illustré de six Fables de La Fontaine avec les textes et un récit résumé de chaque fable. Après lui avoir raconté la fable, je lui lis le texte. Je suis étonné de sa sensibilité au rythme et à la musique des mots.
Samedi 22, dimanche 23, lundi 24 juillet
Cécilia et Charles qui logent à la cabane font une escapade à Stockholm. J’en profite pour prendre leur place pendant trois jours.
C’est une cabane isolée, au bord de la mer, au fond des bois. Elle est équipée de l’électricité mais il faut amener l’eau par citerne. Tout autour, des myrtilliers. Le sauna se chauffe au bois et d’antiques toilettes sèches sont cachées derrière les arbres.
En face, une île toute en longueur et d’autres plus loin. A la surface de l’eau à peine troublée par la brise marine, émergent des rochers comme semés par une main géante. Et par-dessus, le ciel gris- bleu, mauve, bleu-rosé ou doré selon les heures.
C’est le paradis des oiseaux réfugiés sur l’île. Mouettes, cormorans, canards, cygnes à têtes noires qui parfois majestueux s’approchent de la cabane. Un vol d’oies sauvages cingle vers l’est. Je reste assis de longues heures, immobile sur le ponton où sont amarrées les barques pour la pêche de Mona-Lisa et d’Henrick. Je me laisse pénétrer par cette atmosphère de bout du monde. Par la petite musique des bouleaux qui frissonnent sous un vent léger. Par le concert offert dans un silence impressionnant par les oiseaux de l’île et qui est si bien rendu par le compositeur finlandais Einojuhani Rautavaara dans Cantus Articus.
Mona Lisa vient relever ses filets qu’elle a tendus au large ce matin. Elle en ramène un plein seau de poissons qu’elle trie aussitôt et jette les têtes et les viscères aux mouettes qui se les disputent âprement dans un ballet étourdissant. Le vent a fraîchi. Je vais faire un sauna puis je dégusterai des corves grillées dans la cheminée de la cabane.
A cette époque de l’année, le soleil disparait à l’horizon autour de 23 heures. A minuit et demi, le ciel est encore rose. Il réapparait à trois heures du matin. Une clarté mauve, irréelle, mystérieuse nous enveloppe, alors que de la forêt sombre, angoissante, parviennent des bruits furtifs : un ours ? un élan ?
Dans la journée je fais de longues balades en forêt entrecoupées de visites de Nana et des enfants. Un vrai bonheur. Samedi soir nous étions invités chez Viviane et Marcou qui avec Lotta et son mari sont les plus proches amis d’enfance d’Ann Charlotte. Nous étions une trentaine à la cabane de Viviane au bord de la mer. Chacun avait revêtu ses plus habits pour cette partie de campagne dans la plus pure tradition, entonnant en chœur les chants du folklore suédois. Nous sommes en effet en Ostbotnie suédophone.
Nana trotte sur les sentiers. Elle se joue des racines et des cailloux. Nana a le pied sûr. Une vraie finlandaise (ou cévenole). Nana est gourmande. Manger des myrtilles dans les bois ou croquer des petits pois crus qu’elle sort elle-même de leur cosse comme le font les Finlandais. Mais ce sont malgré tout les glaces à la vanille qu’elle préfère. Nana est déjà polyculturelle. Elle connait quelques mots d’arabe que lui apprend Adil, son papa.
Mardi 25 juillet
Direction Soldat Torpet. Nous quittons la route nationale pour emprunter une petite route qui serpente entre les arbres. Elle est jalonnée de maisons d’habitation avec leurs dépendances. Ce paysage, contrairement à la fausse représentation que s’en font les étrangers, n’est nullement monotone. Chaque habitation a son style propre. Certaines sont rouges comme l’étaient les fermes autrefois. D’autres sont beiges, jaunes, ocres ou gris clair. Certaines sont couvertes de tuiles, d’autres, les plus anciennes, de lames de bois. De grands espaces gazonnés, soigneusement entretenus, les entourent agrémentés de massifs de fleurs aux vives couleurs; de statuettes en pierre ou en bois; de vieux outils, faucheuses, charrues, vélos décorés…Chacun s’efforçant de donner une touche personnelle à son habitation.
Après un long périple, nous prenons un chemin empierré étroit. Nous nous enfonçons dans la forêt. Depuis de longues minutes nous ne rencontrons plus d’habitations. De loin en loin des écriteaux écrits à la main : « Vous êtes sur le bon chemin », « Vous allez bientôt arriver ».
Soldat Torpet est un lieu sauvage en pleine nature. Au XIXe siècle, il était imprudent de s’y aventurer car on risquait de fâcheuses rencontres; avec un ours, par exemple, ou pire avec des coupe-jarrets qui attaquaient les voyageurs égarés.
Soldat Torpet est une grande bâtisse en troncs d’arbres assemblés par tenons et mortaises. Quelques marches permettent d’accéder à la terrasse qui occupe toute la largeur de la façade décorée de vieux outils, faux, râteaux, fléaux et meublée de tables et de chaises en bois brut et, clin d’œil du propriétaire à son enfance, un bureau d’écolier à deux places. L’intérieur, d’une remarquable propreté, comporte plusieurs salles de différentes tailles pour la restauration des visiteurs.
Le propriétaire qui a réalisé cet ensemble (avec ses dépendances) il y a une trentaine d’années, nous accueille chaleureusement devant l’entrée, heureux de nous recevoir. Sa cordialité n’est pas feinte. Il ne fait aucune publicité pour son établissement. Il ne reçoit que les personnes qui ont fait le choix de lui rendre visite. Etre reçu à Soldat Torpet se mérite. Avant son installation, c’était un marécage. Il l’a dragué, construit un barrage afin de retenir l’eau et créé un lac de 45 hectares auquel on accède par un sentier au milieu de hautes herbes fleuries. Cette visite reste pour moi un des grands moments de ce séjour en Finlande.
Parmi les bons moments, je n'oublierai pas les repas que Frédéric en cuisinier émérite et Ann-Charlotte, Annélie et Cécilia en pâtissières hors de pair nous ont préparés tout au long du séjour. Avec une mention spéciale pour la soupe de saumon, avec des courgettes, des poireaux, de la pâte de curry et de la crème fraîche.
Clap de fin
Cette belle histoire s’arrête là. Le soir même, je suis pris d’un accès de fièvre qui atteint 40°. C’est l’occasion pour moi de tester le système de santé de la Finlande. Je subis divers examens, un électrocardiogramme, une radio pulmonaire et les médecins me mettent sous antibiotique. Après quelques jours, la fièvre retombe, mais je suis vidé. J’aurais, paraît-t-il, été victime d’une contamination par un lièvre (tularémie). Une vengeance du Lièvre de Vatanen (Arto Paasilinna) ?
C’est Nana qui m’a le mieux soigné, m’auscultant, me faisant des piqûres à l’aide de sa panoplie de médecin; veillant à ce que prenne mes médicaments que j’oublie parfois.
Je me noie dans les yeux de Nana profonds comme des lacs où palpite toute une vie en devenir; des yeux qui passent de l'ombre à la lumière, qui scrutent, interrogent, découvrent. Je craque.
حَبِيبَتِى Nana أَحِبُّ
Bernard DESCHAMPS