l'Humanité
Rosa Moussaoui
08/08/2016
L’assassinat d’une fillette relance le débat sur la peine de mort, objet d’un moratoire depuis 1993.
Son sourire angélique avait fait le tour des réseaux sociaux dès le lendemain de sa disparition, le 21 juillet. Jeudi, le procureur de la République a confirmé le scénario tant redouté. La petite Nihal, 4 ans, a bien été assassinée, probablement par ses ravisseurs. Les ossements et la robe tachée de sang retrouvés non loin du lieu du rapt sont bien, d’après les analyses ADN, ceux de la fillette. Nihal avait été enlevée alors qu’elle jouait aux abords de la maison de ses grands parents, dans la commune d’Aït Toudert, en Kabylie. Le déploiement de la brigade de recherche et d’investigation de la gendarmerie nationale n’a pas permis de sauver la petite fille.
Cet effroyable épilogue a soulevé, dans tout le pays, une vague de colère et d’émotion. Après l’enlèvement et le meurtre de plusieurs enfants en septembre et octobre dernier et tandis que plus de 200 cas d’enlèvements d’enfants ont été recensés pour la seule année 2013, selon le site Algérie-Focus.com, ce nouveau drame relance le débat sur la peine de mort, toujours inscrite dans la loi algérienne mais objet d’un moratoire depuis 1993.
Pour Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative pour la protection et la promotion des droits de l’homme, la levée de ce moratoire contreviendrait à la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, au pacte relatif aux droits civils et politiques ainsi qu’à la charte africaine des droits de l’homme, textes ratifiés par Alger. « L’exécution de la sentence de mort impliquerait de renoncer à ces engagements internationaux. Cela ternirait l’image du pays », fait-il valoir.
Des arguments que les partisans d’une application de la peine capitale écartent d’un revers de main. Abderrahmane Arrar, président du réseau Nada pour la protection des droits de l’enfant, plaide ouvertement pour que la peine de mort soit effectivement infligée aux assassins, violeurs et auteurs d’enlèvements d’enfants. « La protection de la vie des innocents et des faibles est l’affaire de la justice et c’est à elle seule d’infliger des sanctions modèles contre ces criminels », insiste-t-il. Alors que l’enquête se poursuit sur les conditions du rapt et de l’assassinat de Nihal, cette délétère controverse enfle.
Partisans et opposants à la levée du moratoire sur la peine de mort se déchirent et s’invectivent sur les réseaux sociaux.
Hier, une foule immense accompagnait la dépouille de la petite fille au cimetière Ain El Beida d’Oran. Retransmise en direct sur la chaîne Ennahar TV, la cérémonie a pris des allures de rassemblement pour l’application de la peine de mort.
Rosa Moussaoui