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24 juin 2015 3 24 /06 /juin /2015 19:11
ALBERT CAMUS ET L'ALGERIE

"Le libelliste Antoine Perraud dans un article du 21 juin 2015, intitulé La France, les Arabes et Albert Camus, évoque les prises de position d’Albert Camus pendant la guerre d’indépendance de l’Algérie (1954-1962) et notamment sa participation à un meeting organisé dans la Salle du Cercle du Progrès à Alger le 22 février 1956, en faveur de ce qu’il appelait une « trève civile » en réaction à l’état de guerre qui était celui de l’Algérie depuis le 1er novembre 1954. Tout cela est bien connu. Albert Camus né en Algérie dans un milieu pauvre, bien qu’il ait été sensible à la misère des « indigènes », était opposé à l’indépendance de l’Algérie. Voici ce qu’écrivait à ce sujet dans son Journal le 18 février 1957, Mouloud Feraoun qui sera assassiné le 15 mars 1962 par l’OAS : «Camus se refuse à admettre que l’Algérie soit indépendante et qu’il soit obligé d’y rentrer chaque fois avec un passeport d’étranger, lui qui est Algérien et rien d’autre. » Albert Camus déclarait lui-même en janvier 1958 : « en ce qui concerne l’Algérie, l’indépendance nationale est une formule purement passionnelle. Il n’y a jamais eu encore de nation algérienne. » Il était de plus violemment hostile au FLN qu’il qualifiait de fasciste.

J’ai vécu cette époque. Nous avions certes des interrogations sur certaines orientations du Front de Libération Nationale (FLN), rassemblement composite allant des Oulémas aux Nationalistes et aux Communistes algériens, qui dirigeait le combat pour l’indépendance. Nous étions aussi parfois en désaccord avec ses méthodes et sur certaines de ses actions, mais son combat allait dans le sens de l’histoire. Nous ne pouvions rester spectateurs et renvoyer dos à dos le colonisé qui luttait pour se libérer et le colonisateur qui l’opprimait depuis plus de 120 ans. Il fallait prendre parti et choisir son camp. Ce fut l’honneur du Parti communiste Français d’avoir eu le courage de ce choix difficile et plein de risques. (J’ai dit dans Les Gardois contre la guerre d’Algérie et dans Le fichier Z mon opinion sur « les pouvoirs spéciaux » votés par toute la gauche le 12 mars 1956 en faveur du Président du Conseil socialiste Guy Mollet). Ce fut aussi le choix de nombreux intellectuels comme Jean-Paul Sartre et François Mauriac qui n’étaient pas des « intellectuels pavloviens » contrairement à la qualification injurieuse d’Antoine Perraud.

Un choix auquel Camus se refusa.

Il n’y a là rien de nouveau et l’on est donc amené à s’interroger : Pourquoi cette soudaine mise en lumière ? La réponse est contenue, me semble-t-il, dans cette condamnation « symétrique » par Antoine Perraud de « l’enclume colonialiste injuste » et du « marteau indépendantiste éradicateur" . Les mots ont été soigneusement choisis par l’auteur: le colonialisme n’était qu’injuste, alors que les indépendantistes étaient des « éradicateurs ». Sous une phraséologie qui se veut de gauche, le libelle de Perraud participe de la campagne actuellement réactivée contre "les indépendances ». L’Algérie n’est pas la seule visée comme en atteste le titre de l’article : « La France, les Arabes et Albert Camus » qui est par ailleurs révélateur d’une démarche raciale de l’auteur.

Bernard DESCHAMPS, 22 juin 2015

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